Vous n’êtes pas bienvenus: à propos de la réception palestinienne non accueillante de normalisateurs arabes

Un enfant palestinien s’approche du blogueur saoudien Mohammed Saud pour lui cracher dessus lors de sa visite de la vieille ville de Jérusalem dans une délégation du gouvernement israélien

La Ahlan wala Sahlan.” Ces mots sont rarement lancés en Palestine. Interrogez des internationaux qui soutiennent les Palestiniens sur la sorte de générosité avec laquelle les Palestiniens les accueillent dans leurs maisons vides. Lisez les messages de Rachel Corrie à ses parents, les impressions de Richard Gere, les rapports de militants sud-africains, pour n’en citer que quelques uns. Le consensus parmi l’ensemble des visiteurs de la Palestine est que la courtoisie est sans limite.

En revanche, le fait de dire ‘La Ahlan wala Sahlan (Vous n’êtes pas bienvenus) à l’adresse de journalistes saoudiens, émiratis, égyptiens, lors de leur visite de la mosquée d’Al Aqsa et de la vieille ville de Jérusalem, ne devrait pas faire sourciller car l’équipe n’a jamais été invitée par un État palestinien indépendant à visiter un des sites islamiques les plus importants. Les journalistes n’ont fait aucune demande  de voyage en Palestine auprès des ambassades palestiniennes de leurs pays. Au contraire, la visite est organisée en coordination avec les autorités israéliennes, c’est à dire les forces d’occupation. La délégation n’aurait pas eu les moyens de se rendre à Yad Vashem à Jérusalem, entre autres sites qui ne comptent pas la barrière Est de Gaza, si la permission ne leur en avait été donnée par les forces d’occupation. 


 

Pendant ce temps là, plus de quatre millions de Palestiniens de Cisjordanie et de la bande de Gaza n’ont pas le droit de se déplacer dans leurs propres villes et villages, sans parler de Jérusalem. Nous savons que des membres de la délégation ne représentent pas leurs peuples, qui ont payé un prix très lourd pour leur soutien sans faille à la cause palestinienne. En fait, ils représentent des gouvernements impopulaires, dont certains avaient signé des accords avec le Likoud pour abandonner la Palestine, Jérusalem et même la souveraineté de leurs propres pays. Ce que représente cette délégation de normalisation, ce sont des gouvernements qui ne respectent pas la dignité palestinienne, qui arrêtent des Palestiniens aux aéroports et les expulsent dans des conditions inhumaines, des gouvernements qui arrêtent même leurs propres citoyens pour leur soutien aux droits fondamentaux des Palestiniens, des régimes qui ne disent pas ‘Ahlan wa Sahlan’ à tous les Palestiniens. Ce sont des régimes qui jouissent de la torture de citoyens palestiniens et considèrent chaque Palestinien comme un suspect.

La délégation de normalisation ne visite pas la Palestine pour montrer le véritable soutien populaire à la résistance palestinienne héroïque qui continue sur le terrain, ni pour demander aux pays voisins d’ouvrir leurs frontières pour permettre à d’autres Arabes qui soutiennent les Palestiniens de leur envoyer au moins de la nourriture et des médicaments. Non. Ils se rendent en Israël, serrent la main chaleureusement à des criminels de guerre dans une tentative visant à mettre fin à la résistance palestinienne légitime. Ils ne viennent pas en tant que frères avec l’intention de passer une nuit à Wadi El Hummus où, par coïncidence, les hommes de main de Netanyahou commettent un massacre haineux et démolissent des dizaines de maisons. Ils préfèrent les chambres douillettes d’hôtels 5 étoiles à Tel Aviv et la protection de l’armée israélienne. Comme l’exprimaient profondément les mots de feu Edouard Saïd, « les politiques arabes n’ont jamais été aussi corrompues et aussi néfastes qu’à présent ».

À quoi s’attendait la délégation ? À ce que les Palestiniens violent le couvre-feu, prennent des risques aux checkpoints, dépassent les barrières et escaladent les murs pour venir dans la ville occupée de Jérusalem leur souhaiter ‘Ahlan wa Sahlan (la bienvenue)? Cela est réservé aux représentants légitimes de la nation arabe, aux militants BDS et aux autres vrais camarades de lutte !

Haidar Eid

Haidar Eid est professeur associé de littérature postcoloniale et post moderne à l’Université al-Aqsa de Gaza. Il a beaucoup écrit sur le conflit arabo-israélien, dont des articles publiés par Znet, Electronic Intifada, Palestine Chronicle, et Open Democracy. Il a publié des articles sur les études culturelles et la littérature dans un grand nombre de publications dont Nebula, Journal of American Studies en Turquie, Cultural Logic, et the Journal of Comparative Literature.

Traduction: SF pour l’Agence Media Palestine

Source: Mondoweiss

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