L’UE et Jérusalem : La possibilité d’un retour au droit

par Yara Hawari, 25 novembre 2018

(UE Photo)

Résumé

Le déplacement de l’ambassade des États-Unis de Tel Aviv à Jérusalem en mai 2018 a constitué un dangereux précédent qui a, d’une part, encouragé Israël à continuer son annexion de la terre palestinienne et, d’autre part, encouragé des États tiers à violer leurs obligations en matière de droit international. Bien que de nombreux États aient condamné ce déplacement, d’autres ont emboîté le pas et ouvert des ambassades à Jérusalem. La normalisation s’est faite…

Synthèse

Le déplacement de l’ambassade des États-Unis de Tel Aviv à Jérusalem en mai 2018 a constitué un dangereux précédent qui a, d’une part, encouragé Israël à continuer son annexion de la terre palestinienne et, d’autre part, invité des États tiers à violer leurs obligations en matière de droit international. Bien que de nombreux États aient condamné ce déplacement, d’autres, dont le Guatemala et le Paraguay, ont emboîté le pas et ouvert des ambassades à Jérusalem. La normalisation s’est faite assez rapidement, avec différents États, dont le Royaume Uni, annonçant qu’ils assisteraient à des réunions à la nouvelle ambassade des États-Unis.

Ces dernières manœuvres politiques font suite à une détérioration de la situation des Palestiniens dans la ville. La communauté internationale est depuis longtemps impuissante à garantir les droits juridiques et historiques des Palestiniens, tant à Jérusalem-Est qu’à Jérusalem-Ouest. Ceux-ci incluent le droit au retour des réfugiés, la restitution des biens et la jouissance de tous les droits politiques, ainsi que, bien sûr, la libération de l’occupation, comme pour le reste de la Cisjordanie et la Bande de Gaza.

Cet échec à dépasser la simple rhétorique et les déclarations de condamnation, et à faire respecter le droit international a permis à Israël d’asseoir son contrôle sur les Palestiniens et leur terre. La récente normalisation de la souveraineté israélienne sur l’ensemble de Jérusalem est particulièrement dangereuse, car elle envoie à nouveau à Israël le message que l’annexion de la terre palestinienne et, plus généralement, la violation du droit international n’entraînent aucune conséquence pour lui.

L’Union européenne (UE) a pris une position claire vis-à-vis du déplacement de l’ambassade des États-Unis, déclarant qu’elle continue à soutenir le consensus international sur Jérusalem, qui inclut le refus d’y installer des missions diplomatiques tant que la question du statut final de la ville n’aura pas été résolue. Des États membres de l’UE ont réitéré individuellement cette position ; la France, par exemple, a déclaré que ce déplacement contrevenait au droit international. Cependant, la République tchèque, la Hongrie et la Roumanie, qui ont toutes trois assisté à la cérémonie d’ouverture de l’ambassade, ont voté contre une déclaration européenne commune de condamnation de la décision des États-Unis.

Malgré ce manque d’unité concernant les droits des Palestiniens parmi les États membres de l’UE, ainsi que la tendance de l’UE à produire de pâles déclarations de condamnation des violations israéliennes des droits humains, la possibilité que l’UE confronte Israël à ses responsabilités existe. Un fort soutien populaire, au sein de l’UE, aux droits des Palestiniens et à leur souveraineté, ainsi que le fait que les bases de l’UE reposent sur le droit international et les droits humains, en font l’un des rares espaces à défendre encore les droits humains des Palestiniens sur la scène politique internationale.

Cette note de politique s’intéresse au statut de Jérusalem, aux dérives israéliennes dans la ville et aux antécédents d’inaction de l’UE. Elle conclut en proposant des manières dont l’UE pourrait changer cette trajectoire en dépassant la rhétorique et en poussant Israël à respecter les droits des habitants palestiniens de Jérusalem.

Confiscation et répression

L’établissement du Mandat britannique de Palestine en 1923, sous la direction de la Société des Nations, offrait une base légale à la souveraineté palestinienne. Le mandat devait être un arrangement temporaire qui mènerait à l’auto-détermination de la Palestine. Mais en novembre 1947, l’Assemblée générale des Nations Unies vota la Résolution 181, qui recommandait que le pays soit divisé en un État arabe et un État juif. Celui-ci serait établi sur 44 pour cent de la Palestine historique, alors que les Palestiniens arabes composaient plus des deux tiers de la population et possédaient la majorité de la terre. La résolution proposait également que Jérusalem devienne un « corpus separatum » sous administration internationale.

L’Agence juive accepta le plan mais, le considérant injuste, les dirigeants palestiniens le rejetèrent. La violence reprit dans le pays jusqu’à la victoire des forces sionistes et l’établissement de l’État d’Israël en mai 1948, dans 78 pour cent de la Palestine historique.

En 1967, Israël occupa le Plateau du Golan, la Bande de Gaza et la Cisjordanie. Il annexa Jérusalem-Est, présentant cette action comme une réunification de la ville. La communauté internationale le condamna comme un acte illégal, et l’Assemblée générale des Nations Unies vota à l’unanimité une résolution appelant Israël à annuler toutes les mesures prises pendant cette prise de contrôle. Plus tard dans l’année, le Conseil de sécurité des Nations Unies vota également à l’unanimité la Résolution 242, qui appelait à une « paix juste et durable » qui requérait qu’Israël se retire des territoires qu’il occupait. En mai 1968, le Conseil vota la Résolution 252, qui appelait Israël à annuler toutes ses activités à Jérusalem et à « s’abstenir immédiatement de toute nouvelle action qui tend à modifier le statut » de la ville.

L’ONU et une grande partie de la communauté internationale ont invariablement condamné l’annexion de Jérusalem et l’occupation des territoires de 1967. Pourtant, Israël a continué à renforcer son contrôle sur la ville, dans les faits et par le biais de la législation. En 1967, le gouvernement israélien a étendu la municipalité de Jérusalem et l’application de son système juridique à ce territoire. La Loi de Jérusalem de 1980 a ensuite été utilisée comme une déclaration de souveraineté israélienne sur la ville entière, affirmant que « Jérusalem une et indivisible est la capitale d’Israël » et incorporant cette réunification illégale dans les Lois fondamentales d’Israël, qui forment la constitution de l’État.1

Israël a systématiquement détruit la vie économique, politique, culturelle et sociale à Jérusalem. Il a étouffé le secteur du tourisme, entravé le commerce dans la Vieille Ville et marginalisé la fourniture de services, laissant l’économie palestinienne au bord de la faillite. Le mur d’annexion, dont la construction a commencé en 2002 et qui mesure maintenant environ 712 km de long, a envenimé la situation en isolant Jérusalem-Est du reste de la Cisjordanie, ce qui a fait péricliter les échanges et le commerce palestinien dans la ville.

En 2001, la police israélienne a attaqué puis fait fermer la seule institution de l’OLP à Jérusalem, la Maison de l’Orient. Le bâtiment n’abritait pas seulement des archives de recherche, des photographies et d’importants documents diplomatiques. Il constituait également la seule représentation politique palestinienne dans la ville et avait été reconnu comme tel par les participants internationaux à la Conférence pour la paix de Madrid en 1991. D’autres institutions culturelles palestiniennes ont subi des attaques au cours des années, y compris le Théâtre national palestinien, Al-Hakawati, qui a été fermé à plusieurs occasions.

La plupart des Palestiniens à Jérusalem-Est sont enregistrés comme résidents permanents, une désignation qui leur confère moins de droits qu’à leurs homologues israéliens juifs, qui jouissent de la citoyenneté. Le statut de résidents permanents ouvre droit pour les Palestiniens à certains bénéfices sociaux tels que l’assurance maladie et à la possibilité de voter aux élections municipales, mais il ne leur donne pas accès aux pleins droits de citoyenneté, dont le droit de vote aux élections nationales. Les Palestiniens résidents de Jérusalem-Est sont aussi contraints de vivre à l’intérieur de Jérusalem à cause de la politique du « centre de vie », qui impose aux résidents permanents de prouver qu’ils vivent bien à Jérusalem au risque de perdre leur droit de résidence. Depuis 1967, Israël a retiré à plus de 14 000 Palestiniens leur permis de résidence à Jérusalem.

Israël pratique une politique de planification discriminatoire en refusant systématiquement aux Palestiniens des permis de construire et la possibilité d’acquérir des terrains sur lesquels construire légalement. Devant l’accroissement de la population et la pénurie de logements, les Palestiniens n’ont pas d’autre choix que de construire sans permis israélien. Israël considère ces maisons comme illégales, bien qu’il n’y ait aucune juridiction au sein des territoires occupés pour entériner une telle décision. Pourtant, depuis 1967, les autorités israéliennes ont démoli 5 000 maisons palestiniennes. Aujourd’hui, un tiers de toutes les maisons palestiniennes de Jérusalem-Est, abritant plus de 100 000 personnes, risquent la démolition.

Les plus à risque sont les communautés rurales bédouines aux abords de Jérusalem, situées dans une zone désignée par Israël comme E1, qui se trouve en partie dans la zone C de la Cisjordanie. Ce corridor stratégique entre Jérusalem et la colonie illégale de Maale Adoumim sépare le nord de la Cisjordanie du sud. Israël a l’intention de construire un bloc urbain de colonisation qui étendrait la Grande Jérusalem et relierait la ville aux colonies alentour.

Khan Al-Ahmar, 173 habitants, est l’une des nombreuses communautés menacées de démolition. Les autorités israéliennes refusent de fournir au village des infrastructures de base et des services publics tels que l’eau et l’électricité. En 2009, l’Italie, la Belgique et l’UE ont financé une école pour les enfants du village de Khan Al-Ahmar et les communautés bédouines alentour. La destruction de cette communauté est imminente, d’autant plus maintenant que le délai imparti par les Israéliens aux résidents pour qu’ils détruisent eux-mêmes leurs structures a expiré. La Haute représentante de l’UE, Federica Mogherini, a averti que « les conséquences de la démolition de ce village et le déplacement de ses résidents, dont des enfants, contre leur volonté, seraient très graves ».

Inaction et complicité

Les déclarations comme celle ci-dessus de F. Mogherini sont conformes à la pratique de l’UE, qui est de condamner les violations israéliennes du droit international à Jérusalem. L’UE a adopté une ligne discursive claire sur Jérusalem, suivant à la fois le droit international et le consensus international. Le jour du déplacement de l’ambassade des États-Unis, F. Mogherini a déclaré :

L’UE demeure fermement engagée à continuer sa collaboration avec les deux parties et avec ses partenaires de la communauté internationale pour que des négociations significatives reprennent, en vue d’une solution à deux États, sur la base des lignes du 4 juin 1967 et avec Jérusalem comme capitale des deux États. L’Union européenne a une position claire et constante sur Jérusalem, qui a été réaffirmée à plusieurs reprises dans les conclusions du Conseil des affaires étrangères. L’UE continuera à respecter le consensus international sur Jérusalem, exprimé entre autres dans la Résolution 478 du Conseil de sécurité de l’ONU, notamment sur la localisation des représentations diplomatiques jusqu’à ce que le statut final de Jérusalem ait été décidé.

Cependant, ces déclarations n’ont entraîné aucune action pour confronter Israël à ses responsabilités. De même, après l’annonce en 2017 par le gouvernement israélien qu’il allait construire des milliers de nouvelles habitations dans des colonies en Cisjordanie, l’UE a produit une déclaration demandant des « clarifications » et « de reconsidérer ces décisions ». Cette réponse molle est caractéristique du manque de volonté des États tiers d’assumer leurs responsabilités et de dénoncer les violations israéliennes du droit international. Pendant ce temps, les Palestiniens continuent d’être chassés de Jérusalem et de se voir déniés leurs droits fondamentaux.

L’abandon par les États tiers de leurs obligations ne sont qu’une partie de l’histoire ; l’UE se rend complice des violations israéliennes en entretenant une myriade de liens commerciaux et financiers. Depuis 1995, plusieurs initiatives israéliennes ont pu accéder aux fonds pour la recherche de l’UE, y compris, plus récemment, à Horizon 2020, un programme pour la recherche et l’innovation qui a un budget de 80 milliards d’euros. Israël est le seul pays non-européen qui participe pleinement à Horizon 2020. Celui-ci finance plus de 200 projets israéliens, dont certains liés aux entreprises Elbit Systems et Israeli Aerospace Industries, qui ont été accusées de complicité avec les crimes de guerre d’Israël. Bien que les fonds ne soient destinés qu’à des projets d’application civile, la clause du « double usage » leur permet de financer des éléments pouvant également avoir un usage militaire, comme les drones ou la robotique. En d’autres termes, des entreprises israéliennes peuvent avoir accès à des fonds de l’UE pour un projet « civil » puis le développer ultérieurement pour le secteur militaire. Ceci est extrêmement problématique, en particulier parce qu’Israël est à l’avant-garde des technologies militaires et est coupable de crimes de guerre envers le peuple palestinien.

Horizon 2020 renforce aussi la légitimation de l’annexion par Israël de Jérusalem-Est. Le Ministère israélien de la science et l’Autorité israélienne des antiquités, qui bénéficient des fonds d’Horizon 2020, sont situés à Jérusalem-Est. Malgré cela, l’UE a soutenu en 2013 que cela « n’entravait pas » la coopération. De même, l’Université hébraïque à Jérusalem-Est, qui s’étend sur des terres occupées en 1967 – plus précisément, sur le village palestinien d’Issawiyeh – bénéficie également de fonds de l’UE. Autoriser Israël à accéder à ce financement alors qu’il opère sur un territoire illégalement annexé ne va pas seulement à l’encontre du droit international, mais également des principes affirmés par l’UE et de sa position officielle vis-à-vis de Jérusalem.

L’UE : Limites et possibilités

Le déplacement de l’ambassade des États-Unis a accéléré et donné une légitimation au processus de dé-palestinisation de Jérusalem, qui a commencé il y a plus de sept décennies. En l’absence de pressions concrètes, Israël continuera à violer les droits fondamentaux du peuple palestinien à Jérusalem et dans le reste de la Palestine historique, avec le plein appui de l’Administration de Donald Trump et de ses alliés d’extrême-droite en Europe et en Amérique latine.

Malgré l’inaction décrite plus haut et le mouvement mondial de droitisation de la politique, il reste possible que l’UE fasse pression sur Israël et défende les droits humains des Palestiniens. Et ce d’une part parce qu’il y a un soutien populaire fort à la souveraineté et aux droits des Palestiniens, qui a permis la croissance des réseaux de solidarité populaire ; d’autre part parce que les bases de l’UE reposent sur le droit international et les droits humains, comme cela apparaît dans son cadre stratégique :

L’Union européenne est fondée sur une détermination commune à promouvoir la paix et la stabilité et à construire un monde fondé sur le respect des droits humains, de la démocratie et de l’État de droit. L’UE continuera à soutenir de tout son poids les défenseurs de la liberté, la démocratie et les droits humains autour du monde.

L’UE peut mettre Israël devant ses responsabilités par le biais de la coopération économique, culturelle et scientifique mentionnée ci-dessus, en utilisant celle-ci comme un levier pour envoyer le message clair à Israël que son attitude ne sera plus tolérée. En 2015, l’UE a tenté d’envoyer un tel message, mais les résultats ont été on ne peut plus mitigés.

L’UE a produit de nouvelles directives pour l’étiquetage des produits importés des colonies israéliennes illégales (dont celles situées à Jérusalem-Est), en réitérant son engagement au respect des frontières de 1967. Ces directives font partie d’une approche dite de « différentiation », qui vise à exclure des relations bilatérales entre l’UE et Israël les produits issus des colonies et les activités liées à celles-ci.

Beaucoup de ceux qui travaillent pour les droits des Palestiniens dans l’UE considèrent la différentiation et les directives d’étiquetage comme une grande victoire, à la fois moralement juste et juridiquement cohérente. Cependant, ces directives ne sont pas seulement insuffisamment appliquées au niveau des détaillants, mais l’étiquetage relègue cette question au niveau du choix individuel du consommateur, alors qu’il s’agit d’une obligation des États tiers. Elles ne satisfont donc pas à l’obligation de l’UE en matière de droit international et de protection des droits fondamentaux des Palestiniens.

Cette position contraste avec une proposition de loi irlandaise intitulée « Control of Economic Activity (Occupied Territories) » (Contrôle de l’activité économique (Territoires occupés)), votée par le Seanad irlandais (la chambre haute du parlement) en juillet 2018. Celle-ci appelle à une interdiction totale d’importer et de vendre des produits issus des colonies illégales. Bien qu’elle doive encore passer par plusieurs étapes législatives avant de devenir une loi, cette proposition donne l’exemple d’un État membre de l’UE qui met son droit interne et ses obligations en conformité avec le droit international. Elle fait porter la responsabilité de ses actes à Israël, qui profite de l’occupation de 1967 et du vol des terres et des ressources. Si cette proposition devient loi, elle aura certainement des répercussions économiques pour Israël, et pourrait servir d’exemple pour d’autres États membres de l’UE désireux d’agir individuellement et collectivement.

Les fractures internes à l’UE concernant la question de la Palestine sont problématiques. La Pologne et la Hongrie, par exemple, ont des gouvernements autoritaires qui sont de proches alliés d’Israël, et d’autres, comme la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, ont évité de faire pression sur Israël afin de maintenir de bonnes relations diplomatiques.

Ces dynamiques internes à l’UE ont empêché toute action significative en faveur de la Palestine. De fait, peu d’États membres sont prêts à subordonner leur politique étrangère à la politique de l’UE. La politique étrangère de l’UE se déroule plutôt en parallèle des politiques nationales, et ce sont ces dernières qui prévalent. Ce manque d’action est une démonstration du fossé qu’il y a entre les discours et les actes. L’UE ne manque pas d’arguments politiques ou juridiques pour dénoncer l’annexion de Jérusalem par Israël, mais elle manque de volonté politique pour appliquer des mesures punitives concrètes.

Ces limitations ne proviennent pas seulement du système d’États membres et du manque de cohésion en termes de politique étrangère, mais également de l’approche de l’UE qui privilégie la concertation et un pouvoir indirect (soft power) dans un monde où la puissance brute est de plus en plus à l’œuvre. Cependant, il existe des possibilités de changer cette tendance à l’inaction.

Dans ce contexte, les politiques recommandées ci-dessous constituent un point de départ pour que l’UE tienne ses engagements à l’égard des Palestiniens – et du cadre juridique international qu’elle veut préserver.

Mesures immédiates pour une action de l’UE

1. À la suite de sa déclaration commune, l’UE devrait encourager ses 28 États membres à publier des déclarations indépendantes de condamnation du déplacement de l’ambassade des États-Unis, et souligner l’effet délétère que celui-ci aura pour la réalisation de la souveraineté nationale pour les Palestiniens et pour le respect de leurs droits humains fondamentaux.

2. La Haute Représentante de l’UE pour les affaires internationales et la politique de sécurité devrait rappeler que les États membres de l’UE doivent assumer leurs responsabilités d’États tiers en ne facilitant ni n’encourageant les crimes de guerre d’Israël ou les violations du droit international par les États-Unis. Elle devrait à ce propos rappeler aux États membres qu’ils ne devraient pas assister à des réunions ou événements diplomatiques se tenant à la nouvelle ambassade des États-Unis.

3. L’UE doit réévaluer les règles d’Horizon 2020, qui la rende intrinsèquement complice des crimes de guerre d’Israël par la clause du « double usage ». De plus, elle doit insister pour qu’aucune instance et aucune institution israélienne basée à Jérusalem-Est n’ait accès à ces fonds.

4. L’UE et ses États membres doivent appliquer la non-reconnaissance de la souveraineté israélienne sur Jérusalem et adopter une position ferme, afin de s’assurer qu’ils ne sont pas impliqués dans les violations du droit international commises par Israël et les États-Unis. Cela inclut de condamner la tenue d’événements européens à Jérusalem, tels que la course cycliste Giro d’Italia. Ces événements jouent un rôle important dans les efforts d’Israël pour normaliser sa souveraineté sur la ville.

5.À la suite des huit pays de l’UE qui ont réclamé des compensations à Israël l’an dernier pour la confiscation de panneaux solaires financés par l’UE à une communauté bédouine, l’UE et les différents États membres de l’UE devraient intenter séparément des poursuites et monter des dossiers de demande de compensations par Israël lorsque celui-ci détruit des constructions ou des projets qu’ils ont financés. Devant des menaces de démolition immédiate, une campagne collective de demande de compensations financières produirait peut-être un effet dissuasif.

6. Les États membres de l’UE doivent aussi réaffirmer collectivement et individuellement les droits juridiques et historiques des Palestiniens à Jérusalem-Est comme à Jérusalem-Ouest. Ils doivent soutenir la résistance palestinienne et ses efforts pour retrouver sa souveraineté, sans les dépolitiser. Une démarche importante dans ce sens serait de faciliter le retour d’institutions de l’OLP à Jérusalem, telles que la Maison de l’Orient, et aussi de soutenir les organisations populaires.

Cette note de politique est fondée sur un article écrit pour la Fondation Heinrich Böll intitulé « The EU and Jerusalem : A Palestinian Perspective » (L’UE et Jérusalem : Une perspective palestinienne).

Notes:

  1. Bien qu’une grande partie de la communauté internationale divise la ville entre Palestiniens et Israéliens, il est important de noter que cela ne peut pas et ne doit pas nier les droits des Palestiniens sur l’ensemble de Jérusalem. Un certain nombre de ces droits sont inscrits dans la Résolution 194 de l’Assemblée générale des Nations Unies. Malgré cette affirmation du droit des Palestiniens au retour et à la restitution de leurs propriétés ou à des compensations, la communauté internationale, au niveau institutionnel, traite les droits des Palestiniens dans le cadre des frontières de 1967. Ainsi, les acteurs internationaux n’échouent pas seulement à mettre en œuvre les droits des Palestiniens au niveau concret mais également au niveau discursif.

Yara Hawari est chercheuse en politique palestinienne à Al-Shabaka : The Palestinian Policy Network (Al-Shabaka : Réseau de politique palestinienne). Elle a obtenu un doctorat en Politique du Moyen-Orient à l’Université d’Exeter. Sa thèse portait sur les projets d’histoire orale et la politique de la mémoire, dans le contexte plus large des études autochtones. Yara a enseigné l’Université d’Exeter et continue à travailler comme journaliste indépendante, écrivant pour plusieurs médias, tels que Al Jazeera en anglais, Middle East Eye et The Independent.

Traduction : MUV pour l’Agence Média Palestine

Source : Al-Shabaka, The Palestinian Policy Network

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