L’Afrique du Sud va-t-elle repousser l’offensive de charme d’Israël en Afrique?

Par Ali Abunimah – Electronic Intifada – 18 août 2017

Le Premier Ministre Benjamin Netanyahou a participé au Sommet ECOWAS au Liberia en Juin, dans le cadre d’une offensive de charme en Afrique.(via Facebook)

L’Afrique du Sud va boycotter le sommet Afrique-Israël prévu dans la capitale togolaise, Lomé, en octobre.

L’ambassadeur de Pretoria à Beyrouth a déclaré que le sommet était destiné à la normalisation des relations entre des pays africains et ce qu’il a nommé un « État d’occupation ».

Il a aussi appelé à exhorter d’autres États africains à faire de même.

Si l’Afrique du Sud suit, cela peut indiquer qu’elle est prête à exercer un effort diplomatique plus musclé pour contrer l’influence d’Israël.

Le Togo invite les gouvernements de 54 États africains au sommet, mais les Palestiniens, le Maroc et l’Afrique du Sud travaillent à s’y opposer, selon des sources israéliennes citées par le Times d’Israël.

En juin, le roi du Maroc, Mohamed VI, a boycotté un sommet d’ECOWAS, le groupement régional d’Afrique de l’Ouest, au Libéria, car le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou y était invité.

Netanyahu a décrit la volonté du Togo d’accueillir le sommet à venir comme «  le meilleur témoignage du succès de notre politique de présence israélienne en Afrique ».

Un soutien aux régimes d’Afrique « les plus brutaux »

Israël a une longue et sordide histoire d’engagement sur ce continent. Ayant eu un temps des liens avec plusieurs dizaines de pays, ses relations avec les États africains se sont refroidies de façon significative après les guerres de 1967 et de 1973 au Moyen Orient.

Mais Israël a maintenu des liens extrêmement étroits avec l’Afrique du Sud de l’Apartheid. Tel Aviv était le régime de suprématisme blanc principal fournisseur d’armes lorsque Pretoria était sous un embargo international qui se resserrait.

Israël se donne maintenant, auprès des pays africains, une image de pourvoyeur de technologies de développement telles que l’irrigation au goutte-à-goutte – une assistance qu’il a retirée au Sénégal pour se venger du vote de ce pays à une résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU en décembre, qui condamnait les colonies israéliennes illégales sur la terre palestinienne occupée.

Mais Israël a continué à alimenter la violence et des atrocités en Afrique en fournissant des armes utilisées dans les conflits du Sud Soudan et du Burundi et en envoyant des armes au Rwanda avant le génocide de 1994 – un rôle qu’Israël a souhaité dissimuler.

Selon le magazine New African (Le nouvel Africain), l’essentiel du commerce entre Israël et l’Afrique a porté sur « le secteur de la défense et des armées, avec des exportations d’armes israéliennes, d’experts et de techniques à certains des régimes africains les plus brutaux ».

Le Togo, hôte du sommet, est réputé être un pays auquel Israël apporte de l’entraînement militaire.

Mais maintenant, en plus des exportations militaires, selon le New African, de nombreuses entreprises israéliennes « voient l’Afrique comme le lieu de bonnes affaires ».

Israël voit aussi l’amélioration des relations avec les États africains comme un moyen de réduire les vastes majorités qui votent généralement des condamnations de ses violations du droit international à l’ONU.

Un marché secret

L’offensive de charme de Netanyahou en Afrique a comporté des moments mémorables. Dans un discours à peine cohérent, lors de la visite du dirigeant israélien en Ouganda l’année dernière, le président Yoweri Museweni s’est référé à plusieurs reprises à Israël comme « Palestine » et à l’étoile de David comme « étoile de Joseph ».

Museweni a aussi mentionné le fait que les premiers sionistes avaient considéré l’Ouganda plutôt que la Palestine comme une destination pour leur colonisation. « Heureusement, les dirigeants juifs ont rejeté cette absurdité » a dit le président. « Ces dirigeants juifs étaient très, très intelligents, sinon nous vous combattrions aujourd’hui ».

Mais, au lieu de se battre, Museweni et Netanyahou auraient signé des accords secrets dans lesquels l’Ouganda en échange de faveurs sur des contrats d’armement, reçoit des réfugiés et migrants expulsés par Israël.

Le cynisme de l’entreprise de séduction d’Israël envers les États africains est mis en lumière par le racisme incontrôlé, les provocations et les abus contre les migrants et réfugiés africains, orchestrés par Netanyahou et les membres chevronnés de son gouvernement.

L’Afrique du Sud se met en avant?

 Alors que le soutien populaire à la cause palestinienne est puissant et largement répandu en Afrique du Sud, il y a des indices selon lesquels le Congrès National Africain (ANC) qui dirige le pays est sur la voie de s’engager plus avant dans la concrétisation de cette solidarité dans la politique du pays.

La politique sud-africaine officielle soutient toujours la solution à deux États.

Le mois dernier, la conférence politique de l’ANC a adopté une résolution pressant le gouvernement de desserrer vivement ses liens diplomatiques avec Tel Aviv.

Et ce mois-ci, le Parlement sud-africain a refusé une audience à des homologues de la Knesset d’Israël proposée par l’ambassadeur israélien. Ce geste de la part des législateurs a reçu un soutien puissant de groupes militants locaux de terrain et de partis palestiniens.

Ronnie Kasrils, combattant sud-africain historique pour la liberté  et ancien ministre du gouvernement, avertit aussi les législateurs que des groupes de lobby israéliens essaient de minorer leur position en les invitant à des événements avec des représentants officiels israéliens sous le couvert d’organisations de la communauté juive.

Le groupe parlementaire de l’ANC a précisé que le refus de rencontrer la délégation israélienne vient de « l’inquiétude » sur la récente loi de la Knesset qui « légalise » rétrospectivement la prise de terres palestiniennes par des colons.

Il a ajouté que « la poursuite de meurtres de Palestiniens par les forces de sécurité israéliennes, de la détention administrative, des déportations et de nombreuses autres violations des droits humains font partie des raisons pour lesquelles l’ANC ne peut se permettre d’être cooptée dans cette offensive de charme d’Israël via sa visite parlementaire ».

La question est de savoir jusqu’à quel point l’Afrique du Sud va aller et quel succès elle aura en tentant de convaincre d’autres États africains de ne pas être cooptés à leur tour.

Traduction SF pour l’Agence Media Palestine

Source : Electronic Intifada

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