Trump va-t-il aider Israël à annexer la Cisjordanie ?

Par Ali Abunimah, 14 novembre 2016

netanyahu-trump

L’élection de Donald Trump est une occasion en or pour Israël de faire avancer son projet d’annexion de la terre palestinienne.(photo via Facebook)

Le puissant lobby israélien AIPAC semble avoir laissé tomber son engagement formel envers une solution à deux Etats.

Dans son tweet, le militant Daniel Sieradski fait remarquer les changements de langage sur le site de l’AIPAC :

https://twitter.com/selfagency/status/798062081333465088?ref_src=twsrc%5Etfw

Auparavant, la page du lobby sur le « processus de paix » affirmait que l’AIPAC « défend fermement une solution à deux Etats et travaille inlassablement à apporter la paix dans la région ».

Maintenant, la solution à deux Etats n’est plus mentionnée. Et à la place, l’AIPAC dit simplement que « on ne peut imposer une solution aux parties ».

On ne voit pas exactement quand le changement s’est produit, mais Internet Archive confirme qu’il est relativement nouveau. L’aperçu le plus récent du site de l’AIPAC prouve que le langage qui défendait la solution à deux Etats était encore présent en juillet.

Pas plus tard qu’en octobre, le Département d’État a déclaré que la construction continue par Israël de colonies en Cisjordanie occupée « cimentait la réalité d’une occupation perpétuelle dans un seul Etat ».

L’administration Obama peut se réclamer d’une grande part de responsabilité dans cet état de fait. Non seulement elle a échoué à faire de l’aide des Etats Unis à Israël un levier, mais elle en a fait un coup de pied final dans les dents des Palestiniens et les perspectives d’une paix juste, Obama a propulsé sans condition l’aide militaire américaine à Israël à des niveaux records – au moins 38 milliards $ pour la prochaine décennie.

Annexion ?

Il se peut que l’AIPAC en profite simplement pour saisir l’opportunité de l’élection de Donald Trump pour révéler le véritable projet d’Israël : l’annexion permanente de la Cisjordanie occupée.

Le premier ministre d’Israël Benjamin Netanyahu soutient théoriquement une solution à deux Etats, tout en expliquant qu’elle n’est pas possible parce que l’avenir tel que prévu et les conditions nécessaires pour l’assurer n’arriveront jamais.

Les collègues de son cabinet sont moins réservés. La ministre de la Justice Ayelet Shaked, par exemple, a récemment appelé à ranimer la dite « option jordanienne ».

Dans sa version du plan défendue par feu le président Shimon Peres dans les années 1980, Israël annexerait la zone C – les 60 % de la Cisjordanie entièrement contrôlés par Israël d’après les termes des accords d’Oslo de 1993. Les Palestiniens obtiendraient alors une sorte d’autonomie limitée sous tutelle jordanienne dans de minuscules enclaves urbaines où est concentrée la population.

L’AIPAC peut avoir jugé que le moment pour dérouler son véritable projet est opportun, alors que le parti Républicain contrôle la Maison Blanche ainsi que les deux chambres du Congrès.

En fait, la nouvelle posture de l’AIPAC reflète de très près le programme officiel du Parti Républicain dévoilé en juillet, en plein milieu de la campagne électorale.

« Nous rejetons l’idée fausse selon laquelle Israël est un occupant », déclare ce programme. « Les Etats Unis cherchent à aider à l’instauration d’une paix globale et durable au Moyen Orient, qui doit être négociée entre ceux qui vivent dans cette région. »

« Nous nous opposons à toute mesure qui tendrait à forcer à un accord ou à imposer des frontières ou d’autres limites », ajoute le programme.

Il jure de soutenir la législation contre le mouvement de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS) mené par les Palestiniens. Et dans ce qui fait probablement référence à l’ONU, le programme demande aux Etats Unis de couper son financement à toute entité qui cherche à « imposer » des limites à Israël.

Même alors que les positions personnelles du président élu Trump sur la question palestino-israélienne ont été contradictoires, la machine du Parti Républicain, qui s’apprête à prendre les postes de commande du gouvernement, s’aligne sans équivoque sur les factions les plus extrêmes d’Israël.

L’AIPAC « frappée d’apoplexie »

Le lendemain matin de sa victoire renversante, l’AIPAC a rapidement félicité Trump dans un communiqué de presse qui met en relief les points pro-israéliens les plus parlants que le président élu a évoqués en mars, en tant que candidat, dans un discours devant l’AIPAC.

Mais on dit que l’AIPAC est frappée d’apoplexie face à l’une des premières nominations clés de Trump, celle de Steve Bannon en tant que stratège en chef.

https://twitter.com/jonfranks/status/797975490526998528?ref_src=twsrc%5Etfw

(traduction: En privé, l’AIPAC est frappé d’apoplexie devant la nomination de Steve Bannon)

Bannon est l’ancien PDG de l’organe de presse d’extrême droite Breitbart News.

Alors que les reportages et les commentaires de Breitbart News sont fermement pro-israéliens, les lobbys d’Israël accusent Bannon de favoriser les préjugés contre les Juifs.

Jonathan Greenblat, directeur de la Ligue Anti-Diffamation (ADL), a condamné la nomination de Bannon. «C’est une triste journée lorsqu’un homme qui a présidé le premier site web de la ‘alt-droite’ – association mal tricotée de nationalistes blancs et d’antisémites et racistes sans vergogne – est promis à devenir un fonctionnaire de haut niveau dans la ‘maison du peuple’. »

Si des associations majeures américaines anti-palestiniennes sentent que la nomination de Bannon les met dans une position embarrassante, cela fait partie de leurs responsabilités. L’ADL et l’AIPAC peuvent se sentir embarrassées par le visible attachement de Trump à du sectarisme, mais ils sont depuis longtemps les promoteurs sans vergogne du sectarisme et de l’extrémisme de Netanyahu et de son gouvernement, qui n’auront vraisemblablement aucune gêne à traiter avec Trump et sa Maison Blanche.

Abraham Foxman, qui a occupé le poste de directeur d’ADL pendant des décennies jusqu’à ce qu’il prenne sa retraite l’année dernière, a même accueilli, dans une histoire de l’antisémitisme, d’éminents islamophobes tels que le pasteur évangéliste John Hagee, simplement parce qu’ils étaient pro-israéliens.

L’élection de Trump a reçu une réaction enthousiaste de la part des leaders israéliens qui espèrent que le nouveau président déménagera l’ambassade américaine à Jérusalem et les aidera à enterrer la solution à deux Etats une bonne fois pour toutes.

Traduction : J. Ch. pour l’Agence Média Palestine

Source : The Electronic Intifada

Retour haut de page