« Juste quelques appartements de plus » : Netanyahu veut écarter ainsi les craintes sur les colonies israéliennes

Par Ben White – Middle East Eye – 10 juillet 2016

Le Premier ministre d’Israël affirme que sa récente approbation pour 800 nouveaux logements dans les colonies illégales « ne fera pas obstacle à la paix ».

Benjamin Netanyahu est un homme affairé ; il n’a pas le temps assurément de répondre sérieusement aux objections internationales – même de ses alliés – sur des questions aussi mesquines que l’expansion des colonies de peuplement.

C’est l’impression que le Premier ministre d’Israël a donné ce mercredi, quand il a écarté les craintes états-uniennes après sa récente approbation de 800 nouveaux logements dans ces colonies. « Quelques appartements de plus, près de la municipalité de Ma’ale Adumim » ne feront pas « obstacle à la paix » dit Netanyahu.

Telle est la perfidie classique de Bibi.

D’abord, les colonies d’Israël de peuplement du Territoire palestinien occupé sont – chacune d’entre elles – illégales. Ces colonies ne parviennent pas, en aucune manière, à un seuil de légalité quand elles atteignent une certaine importance ; de la plus grande ville-colonie à la plus petite caravane du haut des collines, les colonies sont illégales. Point.

Deuxièmement, les colonies font partie d’un régime par nature discriminatoire. Autrement dit, ce n’est pas « juste » une question de droit international ; le réseau des colonies d’Israël a été établi par l’expropriation de terres et par la violence, et il a généré deux groupes de population « séparés et inégaux ».

Troisièmement, les colonies de peuplement – y compris les soi-disant « blocs » – ont transformé Jérusalem-Est et la Cisjordanie occupées en cantons fragmentés, économiquement dépendants. Elles restreignent la capacité des Palestiniens à accéder aux ressources naturelles, ou à développer leurs entreprises et communautés.

Donc non, la question n’est pas l’ajout d’un balcon ici, ou d’un logement là ; la question c’est que ces colonies sont un défi à la loi, aux droits de l’homme, et à la contiguïté territoriale des terres occupées.

Cela dit, et en dépit de tous les jeux politiques entrant dans les annonces sur les colonies, les mesures prises ces dernières années par l’État israélien pour coloniser de nouvelles terres palestiniennes ne sont pas insignifiantes.

En 2015, par exemple, quelque 62 000 dunums de terres (10 dunums = 1 ha) ont été « ratifiés » par les autorités israéliennes en tant que « terres d’État », jamais autant depuis 2005. La ratification est un précurseur nécessaire à l’attribution de terres destinées à l’expansion des colonies, ou pour, rétroactivement, « légaliser » les avant-postes coloniaux non autorisés.

En août 2014, Israël a déclaré 1000 acres (environ 400 ha) de la région de Bethléhem comme « terres d’État », toutes prêtes pour la construction coloniale. Sous Netanyahu, les nouvelles constructions dans les colonies situées à l’extérieur du Mur de séparation, lui aussi illégal, ont augmenté, proportionnellement à la quantité totale, de 20 à 35 %.

Ainsi, pour continuer à construire de nouvelles maisons dans les colonies, à étendre les colonies et à superviser une population toujours plus importante de colons, Israël envoie un message clair : le gouvernement israélien n’a aucun respect pour le droit international, et il rejette les droits fondamentaux des Palestiniens.

Comme l’indique la déclaration, cette semaine, du secrétaire général des Nations-Unies, la construction de colonies « soulève des questions légitimes sur les intentions à long terme d’Israël », elle s’inquiète de ce « qu’elles se trouvent aggravées par les déclarations répétées de certains ministres israéliens appelant à l’annexion de la Cisjordanie ».

Effectivement, cette semaine même, le ministre israélien des Renseignements, Yisrael Kats, a exhorté le gouvernement à annexer les grandes colonies illégales de Ma’ale Adumim, Givat Ze’ev, Beitar Illit et Gush Etzion. Un projet de loi proposant l’annexion de Ma’ale Adumim va bientôt être présenté à la Knesset.

Un porte-parole du département d’État des États-Unis a dit de la dernière annonce qu’elle était une « dernière étape dans ce qu’il semble être un processus systématique de saisies de terres, d’expansion des colonies et de légalisation des avant-postes, qui, fondamentalement, sape les perspectives d’une solution à deux États ».

Il a également exprimé la préoccupation de l’Administration Obama devant « la désignation des terres de Cisjordanie pour une utilisation israélienne exclusive ».

Lentement, le langage des responsables occidentaux commence donc à correspondre à ce que les Palestiniens, les groupes des droits de l’homme et les militants de la solidarité disent depuis des décennies. Malheureusement, le rythme de cette évolution n’est pas assez rapide – et rien n’indique qu’il existe une volonté politique pour aller à un changement politique à la hauteur de l’analyse.

Mais c’est un signe que, même à Washington DC, personne ne va gober l’objection de Bibi, « ce ne sont juste que quelques appartements ».

 

Ben White est l’auteur de L’apartheid israélien : un guide pour les débutants, et Palestiniens en Israël : ségrégation, discrimination et démocratie. Il écrit pour Middle East Monitor, et ses articles sont publiés par Al Jazeera, al-Araby, Huffington Post, The Electronic Intifada, Comment is free du Guardian, et d’autres encore.

Traduction : JPP pour l’Agence Média Palestine

Source: MiddleEastEye.net

 

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