Pourquoi il est dangereux de confondre Hamas et Daesh

par Belal Shobaki, le 22 Février 2016

Palestinians Hamas supporters take part in a rally ahead of the 27th anniversary of the movement founding, in Jabaliya in the northern Gaza Strip December 12, 2014. Photo by Ashraf Amra

Des supporters palestiniens du Hamas prennent part à un rassemblement à l’approche du 27 ème anniversaire de la fondation du mouvement, le 12 décembre 2014 à Jabaliya au nord de la Bande de Gaza. Photo d’Ashraf Amra

 

Alors que les efforts d’Israël pour lier au terrorisme mondial la résistance palestinienne à son occupation militaire ne sont pas nouveaux, cet Etat a développé sa propagande en direction de ses auditoires aussi bien arabes qu’occidentaux. En agissant ainsi, il est clair qu’il cherche à exploiter l’aversion mondiale envers les mouvements qui ont dérivé vers l’extrémisme et le terrorisme, tout en prétendant représenter l’Islam. « Le Hamas c’est ISIS et ISIS c’est le Hamas », a déclaré en 2014 aux Nations Unies le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Pourtant, mieux que n’importe qui, Netanyahu et le monde politique israélien savent que le Hamas et Daesh n’ont pas de liens, comme le savent les régimes arabes qui mettent tous les mouvements islamiques dans le même sac pour arriver à leurs propres fins. (1)

Non seulement le Hamas et Daesh n’ont pas de liens, mais ils sont des ennemis implacables, et Daesh a dénoncé le Hamas comme mouvement apostat. L’analyste politique d’Al-Shabaka, Belal Shobaki, examine les principales façons dont le Hamas diffère de Daesh, y compris son approche de la jurisprudence, sa position concernant la nature de l’État et ses relations avec les autres religions. Il défend l’idée qu’il est spécialement important pour le mouvement national palestinien de réfuter les tentatives de confusion entre Hamas et Daesh et fait remarquer les dangers de ne pas le faire.

Favoriser un gain politique à court terme

La confusion Hamas Daesh ignore la réalité du terrain. L’environnement politique en Palestine se définit par l’occupation, alors que l’environnement politique dans les pays arabes où Daesh a émergé se définit par l’autoritarisme et la répression ainsi que les conflits sectaires et religieux, environnement idéal pour qu’émerge une idéologie radicale alimentée par une violence aveugle.

Pour Israël cependant, la tentative de lier les deux peut être payante régionalement et internationalement. De nombreux médias arabes n’ont aucun scrupule à faire référence à cette organisation terroriste comme à un Etat « islamique » bien que cela n’ait rien à voir, tandis que de nombreux médias occidentaux adoptent, sans vérification, la confusion israélienne entre Hamas et Daesh. Les régimes arabes n’ont pas envie de défendre l’image du Hamas. Même l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) ne semble pas concernée par la défense de l’image internationale du Hamas étant donné la division politique entre le Fatah et le Hamas.

On considère le Hamas comme faisant partie des Frères Musulmans qui sont perçus comme une menace pour les régimes autoritaires arabes, particulièrement dans le Mashreq. C’est ainsi qu’une façon, pour les régimes arabes, de combattre les Frères Musulmans, c’est de déclarer qu’ils sont sur le même terrain que Daesh ou qu’ils sont même synonymes, comme le déclare le régime égyptien, puis d’utiliser ceci comme une façon de justifier l’exclusion des Frères Musulmans d’une participation à la vie politique.

Les développements rapides de ces cinq dernières années en Egypte, pays offrant la seule sortie possible de la Bande de Gaza palestinienne, ont poussé le Hamas dans son économie souterraine des tunnels. La posture égyptienne officielle après le coup d’État d’Abdel Fatah Sisi contre le président élu Mohammed Morsi s’est durcie contre la Bande de Gaza, en prétendant que le Hamas avait collaboré avec les groupes jihadistes dans le Sinaï, même discours que celui promu par Israël et ses médias. Ce discours est cependant erroné. D’une part, il est trop risqué pour le Hamas de maintenir une relation étroite avec les jihadistes du Sinaï, alors que, d’autre part, ils combattent ceux qui adoptent la même idéologie à Gaza. Les seuls liens noués par le Hamas avec ces groupes l’ont été pour assurer les besoins de l’enclave assiégée par Israël et l’Egypte. Cette interaction n’est pas motivée par une identité idéologique partagée ou par une inimitié partagée envers le régime égyptien. En réalité, le Hamas a ardemment souhaité conserver l’ouverture de lignes de communication avec le régime égyptien, même quand des accusations de confusion du Hamas avec les groupes salafistes jihadistes du Sinaï ont été portées dans les médias. Le Hamas a également dit avec insistance qu’il souhaitait vivement reconstruire sa relation avec l’Egypte afin d’assurer licitement le flux des marchandises, des services et des personnes vers Gaza.

Il est important de réfuter ce discours qui concerne l’un des plus importants mouvements politiques palestiniens : Exclure les islamistes modérés de la vie politique comporte le risque de pousser la société palestinienne vers le radicalisme, auquel cas et le Fatah et le Hamas se retrouveraient à combattre les groupes takfiri. Le débat qui suit démontrera les vraies différences entre Hamas et Daesh aussi bien que la vraie inimitié qui existe entre eux.

Différences de doctrine

Le Hamas se positionne comme un mouvement islamique centriste et comme une extension des Frères Musulmans, avec une autorité jurisprudentielle rationnelle, alors que Daesh adopte une approche qui a à voir avec les textes musulmans isolés de leur contexte historique et refuse de les interpréter en accord avec les développements actuels. Ce qui fait que, pour Daesh et d’autres groupes takfiri en général, des mouvements tels que le Hamas sont laïques et non-islamiques, puisque le Hamas est essentiellement un mouvement de résistance à l’occupation israélienne et qu’il fait confiance à une autorité musulmane modérée. En plus, le Hamas ne prend pas les textes musulmans à la lettre ; il autorise l’ijtihad – interprétation et utilisation de la discrétion. Certains spécialistes ont classé ces mouvements selon une ligne horizontale avec, à droite, les défenseurs du texte et, à gauche, les défenseurs de la raison (2). Avec cette classification, on peut trouver les Frères Musulmans très à gauche sur la ligne, alors que Daesh est loin à droite.

Daesh caractérise le Hamas et son discours comme déviants. Le Hamas de son côté a condamné les menaces de Daesh et a considéré qu’elles faisaient partie d’une sale campagne qui s’étend au-delà de la Palestine. Lorsque les menaces de Daesh et d’autres groupes tafkiri se sont traduites en actes, le Hamas ne s’est pus contenté de condamnations. Mahmoud al-Zahar, leader éminent du Hamas, a déclaré : « On peut constater les menaces de Daesh sur le terrain, et nous maîtrisons la situation du point de vue sécuritaire. Quiconque porte atteinte à la sécurité sera traité en accord avec la loi, et quiconque souhaite débattre intellectuellement pourra débattre intellectuellement ; nous traitons cette affaire avec sérieux. »

Le Hamas avait en fait négocié fermement avec un groupe semblable à Daesh. En août 2009, Abdul Latif Musa, chef du groupe armé « Jund Ansar Allah » (Supporters des Soldats de Dieu), annonçait dans la mosquée Ibn Taymiyyah la création de l’Emirat Islamique à Gaza. Le groupe avait précédemment été accusé de détruire des cafés et autres lieux de réunion dans la Bande de Gaza, poussant le gouvernement du Hamas à un affrontement. Les forces de sécurité, renforcées par les Brigades al-Qassam (aile militaire du Hamas), ont encerclé la mosquée Ibn Taymiyyah et, le groupe de Musa refusant de se rendre, le Hamas a mis fin, dans l’oeuf, au projet d’émirat en tuant les membres du groupe. Le Hamas a été critiqué pour son utilisation de la violence, mais a justifié ses actes en arguant que la violence que de tels groupes auraient pu pratiquer aurait été bien pire que celle utilisée pour éradiquer l’extrémisme dans la Bande de Gaza.

Les supporters de Daesh à Gaza sont beaucoup moins nombreux que ceux du Hamas, principalement parce que ces groupes n’ont pas historiquement contribué à la résistance à l’occupation. Quelques scrutins suggèrent que 24 % des Palestiniens ont une opinion positive sur les mouvements jihadistes, mais ce pourcentage est exagéré. Lorsque quelques Palestiniens se réjouissent de l’hostilité de groupes jihadistes envers les USA, ce n’est pas parce qu’ils ont foi en ces groupes, mais plutôt parce qu’ils voient les USA et leur soutien sans bornes à Israël comme jouant un rôle destructeur.

Positions différentes sur le statut de l’État

Le Hamas et Daesh diffèrent dans leur regard sur l’État moderne, en théorie comme en pratique. Comme noté plus haut, le Hamas a toujours autorisé l’ijtihad ou discrétion, en développant ses pensées et ses opinions. Il est donc injuste d’asseoir la position du Hamas sur l’État civique et la démocratie fondés sur les premiers écrits du mouvement d’origine, les Frères Musulmans. Le Hamas maintient qu’il a adopté de nouvelles convictions à cet égard et en est arrivé à pleinement accepter la démocratie et le concept d’État civique. En fait, les Frères Musulmans eux mêmes ont évolué. Le cheik Yusuf al-Qaradawi au Qatar , autorité jurisprudentielle de l’ensemble des Frères Musulmans, a déclaré à de multiples occasions, y compris dans son livre « L’État en Islam », que le concept d’État religieux n’existe pas en Islam. Selon al-Qaradawi, l’Islam plaide pour un Etat civique établi sur le respect de l’opinion du peuple fondée sur l’Islam, établi aussi sur le principe de responsabilité et de pluralisme politique. Bien que le débat sur la relation entre Islam et démocratie soit antérieure aux Frères Musulmans, il a gagné en clarté après les années 1950, lorsque de nombreux penseurs musulmans, dont al-Qaradawi, le leader tunisien et cofondateur d’Ennahda Rached Ghannouchi et le philosophe algérien Malek Bennabi ont affirmé qu’Islam et démocratie n’étaient pas contradictoires.

A l’extrémité opposée, le mouvement que représente Daesh rejette la démocratie dans son entièreté et la considère comme un système de gouvernance apostat. Bien que certains groupes jihadistes ne dénoncent pas les islamistes qui prennent part à un processus démocratique comme étant des apostats, ils considèrent cependant que leur choix est erroné. Daesh regarde toute expression de démocratie telle que des élections comme une manifestation d’apostasie et tout mouvement ou individu prenant part à des élections comme des apostats : Au contraire, les Frères Musulmans ont participé dès leur début à des élections lorsque leur fondateur Hassan al-Banna a décidé de participer aux élections législatives égyptiennes que le gouvernement du parti El-Wafd avait cherché à tenir en 1942. Bien que al-Banna n’ait pu se présenter parce que le gouvernement avait rejeté sa candidature, les Frères Musulmans ont siégé dans des parlements arabes et parfois dans l’organe exécutif.

Quand, en 1996, le Hamas a décidé de ne pas participer aux élections de l’Autorité Palestinienne, il s’est appuyé sur une position politique et idéologique envers les Accords d’Oslo. Cependant, le Hamas a autorisé ses membres à participer aux élections en tant que candidats indépendants. Quand les circonstances ont changé et que les Accords du Caire de 2005 ont remplacé les Accords d’Oslo comme cadre de gouvernance pour les élections de l’AP, le Hamas à décidé de participer. Il a choisi beaucoup de membres du mouvement et quelques indépendants pour former un liste Changement et Réforme et être candidats au Conseil législatif, gagnant la majorité des voix.

En participant aux élections, le Hamas a fait la preuve qu’il était disposé à travailler dans un Etat moderne et un système démocratique. Il a appelé à des gouvernements de coalition comprenant des partis de gauche et laïques. Ses listes gouvernementales aussi bien que parlementaires comprenaient des femmes et, dans son premier gouvernement, il y avait des ministres musulmans et chrétiens.

Daesh, au contraire, a tourné le dos à toutes les institutions modernes dans les zones qu’il contrôle, refusant de reconnaître les frontières ou l’identité nationale. Il gouverne avec des décisions chaotiques et individuelles. Bien que Daesh ait ardemment désiré utiliser les termes administratifs issus de la tradition musulmane tels que caliphat et shura (consultation), l’essence de sa gouvernance contredit de maintes façons la majorité des textes indiscutables dans la tradition de la législation islamique. Par exemple, il ne se plie pas aux conditions établies dans le Coran et la sunna (les enseignements du prophète Mohamed) pour déclarer la guerre ou pour la protection des civils et le traitement des prisonniers en temps de guerre. Un autre exemple est son imposition de la jizya (impôt qui était levé sur les sujets non-musulmans), qui n’est pas supposée s’appliquer aux habitants indigènes, même s’ils ne sont pas musulmans. Qui plus est, il a attaqué des lieux de culte et agressé des fidèles chez eux, en violation évidente du Coran et de la sunna.

Jusqu’à un certain point, Daesh ressemble aux régimes hybrides du Tiers Monde qui utilisent un vocabulaire moderne et démocratique pour décrire leur processus politique, même alors qu’ils demeurent fondamentalement autoritaires.

Aux antipodes dans le traitement de l’Autre

La différence la plus significative entre Hamas et Daesh est leur position envers les disciples d’autres religions. Pendant sa formation, le Hamas a publié une charte qui utilisait un vocabulaire religieux pour décrire le conflit. Après de sévères critiques, le Hamas a efficacement mis cette charte de côté et ne la considère plus comme une référence faisant autorité, comme l’ont confirmé certains de ses leaders.

Dans son interview avec le Jewish Daily Forward, le chef adjoint du bureau politique du Hamas Moussa Abu Marzouk a confirmé que la Charte était en marge du mouvement et n’inspirait pas sa politique. Il a ajouté que beaucoup de ses membres parlaient de la modifier parce que plusieurs aspects de sa politique actuelle étaient en contradiction avec elle. Les responsables du bureau politique du Hamas à l’étranger n’ont pas été les seuls à désavouer la charte. Le chef du Hamas à Gaza, Ghazi Hamad, est même allé plus loin dans une interview avec le journal saoudien Okaz dans lequel il a dit que la charte était l’objet de discussions et d’évaluations dans le cadre de leur ouverture sur le monde. Sami Abu Zuhri, jeune leader du Hamas qui a été le porte-parole du mouvement pendant la Seconde Intifada, a insisté, dans une interview avec le Financial Times, pour qu’on détourne le projecteur loin de la charte de 1988 et que le Hamas soit jugé sur les déclarations de ses leaders.

Aujourd’hui, le Hamas adopte le verset coranique qui dit : « Allah ne vous interdit pas, concernant ceux qui ne vous combattent pas pour des questions religieuses et ne vous chassent pas de vos maisons – d’être justes envers eux et d’agir honnêtement envers eux. En vérité, Allah aime ceux qui agissent honnêtement. » Ce verset recommande bienveillance et justice lorsqu’on a à faire avec des gens d’autres religions. Contrairement à Daesh, le Hamas l’a mis en pratique. En plus de nommer des ministres chrétiens dans son gouvernement, il a célébré Noël avec les chrétiens palestiniens en envoyant des délégations officielles sur place pendant la fête. Pendant ce temps, Daesh a menacé de mort ceux qui célébraient Noël à travers le monde.

Certains peuvent avancer que ces démarches sont des moyens par lesquels le Hamas essaie d’enjoliver sa gestion autoritaire. Pourtant, il y a peu de différence entre la gestion du Hamas et celle du Fatah. On ne peut considérer les violations des droits de l’Homme perpétrées par le gouvernement de Gaza comme une indication de la ressemblance du Hamas avec Daesh, mais plutôt comme une indication de sa mauvaise gouvernance. La direction politique du Hamas s’est déclarée à l’occasion contre de telles pratiques, par exemple celles commises par le ministère de l’Intérieur sous Fathi Hammad.

Lorsque quelques personnes ont été attaquées par des groupes extrémistes à Gaza, le Hamas et le gouvernement ont agi pour assurer leur sécurité et punir leurs agresseurs, comme dans le cas du journaliste britannique Alan Johnston qui a été libéré par le Hamas des mains de ses ravisseurs radicaux et à propos du meurtre du militant italien de la solidarité Vittorio Arigoni.

La position du mouvement envers les Chiites est semblable à celle adoptée envers les chrétiens. Au moment où le Moyen Orient fait l’expérience d’une guerre médiatique entre Chiites et Sunnites, le Hamas refuse de dénoncer les Chiites comme apostats et a traité politiquement avec eux. Quand la relation avec l’Iran s’est tendue pendant la crise syrienne, le désaccord était plus politique que doctrinal. Daesh de son côté pense non seulement que les Chiites sont des apostats, mais également tous les autres groupes sunnites qui ont une idéologie différente, et il croit qu’il faut les combattre.

Même la façon dont les deux organisations traitent leur ennemi diffère. Le Hamas identifie l’occupation israélienne comme l’ennemi, tandis que Daesh considère tout autre que lui comme son ennemi. Daesh s’est vanté de ses nombreux crimes contre l’humanité dans sa façon de traiter ses otages et les civils sous son pouvoir, y compris le fait d’avoir brûlé vif le pilote jordanien Muath al-Kasasbeh. Il a essayé de légitimer sa conduite inhumaine en modifiant ou en faussant l’interprétation des textes religieux. Le Hamas a présenté ses condoléances à la famille al-Kasasbeh et condamné la conduite de Daesh. Contraste de la brutalité de Daesh avec la façon dont le Hamas a traité le soldat israélien Gilad Shalit pendant sa captivité, comme même le Jérusalem Post le relate.

Avancée dans les relations avec le Hamas

Hamas et Daesh sont tous les deux sur la liste des organisations terroristes dans beaucoup de pays, y compris les membres de l’Union Européenne et les Etats Unis. Cependant, le motif de la mise du Hamas sur les listes est clairement politique : contrairement à Daesh, le Hamas n’a ni ciblé ni appelé à cibler aucune entité autre que l’occupation israélienne. Le Hamas a été ajouté à la liste des organisations terroristes après les événements du 11 septembre 2011, même alors qu’il n’avait rien à voir avec cette attaque terroriste. La nature politique de la position contre le Hamas est mise en évidence par le fait que le Tribunal de l’Union Européenne a émis, le 17 décembre 2014, une résolution exigeant le retrait du Hamas de la liste des organisations terroristes. Le tribunal démontrait que l’ordre de lister le Hamas en 2003 se fondait sur des rapports médiatiques plutôt que sur des preuves solides.

En plus, de nombreux dignitaires européens et américains, connus pour leur position hostile aux organisations terroristes à travers le monde, ont rencontré des leaders du Hamas à plus d’une occasion. Parmi eux, il y a des parlementaires européens et l’ancien président américain Jimmy Carter qui a rencontré Ismail Haniyeh à Gaza en 2009 et Khalid Meshaal au Caire en 2012.

En conclusion, la tentative d’Israël d’exploiter un Moyen Orient chaotique en mettant en cause le Hamas en tant que groupe terroriste lié à Daesh est sans fondement. Le Hamas est idéologiquement, intellectuellement, jurisprudenciellement et politiquement différent de Daesh. Les médias qui adoptent le discours israélien portent atteinte à leur professionnalisme et à leur crédibilité.

Les mouvements palestiniens ne doivent pas permettre au désaccord avec le Hamas de justifier les accusations qui font du tort à la cause palestinienne internationalement et créent des tensions localement. Le Hamas doit aussi réaliser que les différences entre eux et Daesh ne signifient pas que sa gouvernance de Gaza est exempte d’abus et de violations des droits de l’Homme, et qu’il doit donc revoir sa conduite et être plus prudent dans son discours politique. Il devrait dépasser la démarche qui consiste à avoir un discours pour la consommation locale et un autre pour la consommation mondiale, car chaque mot prononcé par quelque leader du Hamas que ce soit est commercialisé à l’étranger comme un message du Hamas au monde.

Quand l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) dirigée par le Fatah et quand les régimes arabes, spécialement l’Egypte, ne s’opposent pas aux efforts pour lier le Hamas à Daesh – ou, en réalité, contribuent occasionnellement à ces efforts – il se peut qu’ils « bénéficient » à court terme de l’affaiblissement du Hamas en tant qu’adversaire politique. Pourtant, cette situation comporte des dangers de déstabilisation de la société palestinienne à moyen et long terme. Exclure des musulmans modérés pourrait pousser la société palestinienne vers le radicalisme, auquel cas et le Fatah et le Hamas se retrouveraient à combattre les groupes takfiri.

Les documents d’Al-Shabaka peuvent être mis en circulation comme émanant de Al Shabaka : Réseau Politique Palestinien. L’opinion individuelle des membres du réseau politique Al-Shabaka ne reflètent pas nécessairement les opinions de l’organisation en son entier.

(1) ISIS : État Islamique d’Irak et de Syrie. Daesh est l’acronyme arabe pour ISIS. Quelques commentateurs disent ISIL : Etat Islamique d’Irak et du Levant. Le groupe lui-même a commencé à utiliser IS en 2014.

(2) Samir Suleiman, Islam, Demokratie und Moderene ; Herzogenrath : Shaker Media, 2013, p. 302. Tariq Ramadan, Les Musulmans en Europe, Marburg : Medienreferat, 2001, p. 15.

Belal Shobaki

Membre du Réseau Politique Al-Shabaka, Belal Shobaki est professeur assistant au département de Sicences Politiques à l’université d’Hébron, Palestine. Il est membre de l’Association Américaine d’Etudes Politiques. Il a srti un livre sur Islam politique et identité et travaille maintenant à un livre sur la division palestinienne. Shobaki est l’ancien rédacteur en chef du journal Alwaha en Malaisie. Il a aussi été maître de conférences au département de Sciences Politiques de l’université nationale An-Najah et le directeur de l’Unité d’études du Centre Palestinien pour la Démocratie et les Etudes.

Traduction : J. Ch. pour l’Agence Média Palestine

Source : Al-Shabaka, the Palestinian Policy Network

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