Comment Israël protège ses colons qui brûlent vifs les enfants palestiniens

Par Ali Abunimah, 31 juillet 2015

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Un parent affligé à côté du petit Palestinien de 18 mois, Ali Dawabsha, tué le 31 juillet dans l’incendie de la maison de sa famille, dans le village de Duma en Cisjordanie occupée, lors d’une attaque dont les suspects sont des colons juifs. (Ahmad Talat / APA images)

Avant l’aube vendredi matin, le tout petit Palestinien de 18 mois, Ali Dawabsha, est mort brûlé dans un incendie criminel provoqué sur deux maisons du village de Duma dans le nord de la Cisjordanie occupée.

Le meurtre d’Ali Abwabsha n’est pas le premier exemple de Palestiniens brûlés vifs par des colons israéliens.

Etant donné l’impunité garantie par Israël à ses colons, quelle chance y a-t-il vraiment pour que les meurtriers d’Ali soient présentés à la justice ?

« Nous avons vu quatre colons s’enfuir en courant à distance les uns des autres », a dit à l’Agence Ma’an News Musallam Dawabsha, 23 ans, l’un des villageois qui a essayé de venir en aide. « Nous avons essayé de les poursuivre, mais ils ont fui vers la colonie voisine de Maaleh Ephraim. »

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Un mot hébreu peint sur le mur d’une des deux maisons du village de Duma en Cisjordanie occupée, endommagées lors de l’incendie criminel du 31 juillet, dit « Vengeance ». Un autre slogan peint sur la maison dit « Longue vie au Roi Messie ». (Ahmad Talat / APA images)

Les attaquants ont aussi laissé derrière eux des graffitis disant clairement leurs motivations racistes : ils ont peint un Etoile de David et les mots « Vengeance » et « Longue vie au Roi Messie » sur les murs.

La mère d’Ali est maintenant dans un état critique avec de graves brûlures sur 90 pour cent de son corps. Son père est brûlé à 80 pour cent et son frère de 4 ans à 60 pour cent.

Des larmes de crocodile

Après cette horreur, les représentants du Premier Ministre Benjamin Netanyahu ont mis en place un simulacre ostentatoire de condamnation et de chagrin et de serments comme quoi ils présenteraient les meurtriers à la justice.

https://twitter.com/netanyahu/status/627039959594217473

« Je suis choqué par le meurtre d’Ali Dawabshe. C’est un acte horrible et répréhensible à tous égards. L’État d’Israël adopte une ligne ferme contre le terrorisme quels qu’en soient les auteurs. J’ai ordonné aux forces de sécurité d’utiliser tous les moyens à leur disposition pour arrêter les meurtriers et les présenter sur le champ à la justice. Le Gouvernement d’Israël est unanime dans sa ferme opposition à des actes aussi terrifiants et déplorables. Au nom des citoyens d’Israël, j’aimerais partager le chagrin de la famille d’Ali Dawabshe et souhaiter un prompt rétablissement aux membres de sa famille qui ont été blessés. »
Signé : B. Netanyahu

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Benjamin Netanyahu
@netanyahu
Je suis choqué par le meurtre d’Ali Dawabshe. C’est un acte horrible et répréhensible à tous égards.
10H55 – 31 juillet 2015

Avi Mayer
@AviMayer
J’encourage tous les leaders d’Israël -droite et gauche, religieux et laïcs- à s’élever contre le meurtre de l’enfant palestinien.
11H31 – 31 juillet 2015

https://twitter.com/AviMayer/status/627049034516144128

Au même moment, l’occupation a commencé sa punition collective des Palestiniens, engageant des renforts en Cisjordanie pour réprimer des manifestations potentielles et interdisant aux Palestiniens l’accès à la mosquée al-Aqsa à Jérusalem occupée.

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Des photos de famille gisent parmi les débris de la maison de Duma, Cisjordanie occupée, dans laquelle le petit Ali Dawabsha est mort brûlé le 31 juillet dans l’attaque menée par des colons juifs suspectés. (Ahmad Talat / APA images)

Il est difficile d’imaginer un affichage plus hypocrite que ces larmes de crocodile des mêmes dirigeants qui ont perpétré le massacre de 2.200 Palestiniens l’année dernière à Gaza, dont plus de 500 étaient des enfants, et qui feignent d’être outragés par le meurtre d’un de plus.

Bien sûr, les déclarations israéliennes ont un but spécifique : essayer de dépeindre le meurtre d’Ali Dawabsha comme un acte exceptionnel et voiler la réalité qui est que la violence individuelle de colons fait partie intégrante de la structure de l’occupation coloniale et de l’apartheid israéliens.

Pour Israël, ce n’est qu’une simple crise de relations publiques et les expressions d’outrage et de « chagrin » ne sont rien de moins que la hasbara – propagande – prescrite par les conseillers pour la période actuelle d’information.

Tout aussi hypocrite serait n’importe quelle condamnation venue de l’administration américaine du président Barak Obama, qui se vante régulièrement de tout ce qu’elle a fait pour armer et financer Israël et le mettre à l’abri de toute responsabilité.

Comme le compte Twitter satirique @Ask_Netanyahu le dit si bien :

Benjamin Netanyahu
@Ask_Netanyahu
Mon message aux miliciens qui ont tué Ali Dawabsha est clair : si vous voulez tuer des bébés palestiniens, mettez un uniforme.
9 H.09 – 31 juillet 015

« Une question de temps »

« Un enfant brûlé n’était qu’une question de temps », a déclaré l’association israélienne des droits de l’Homme B’tselem après l’attaque de ce matin.

« La cause en est la politique des autorités qui veulent éviter le renforcement de la loi contre les Israéliens qui s’en prennent aux Palestiniens et à leurs biens », ajoute l’association. « Cette politique crée une impunité pour les crimes de haine et encourage les agresseurs à continuer, ce qui conduit au résultat atroce de ce matin. »

« Ces dernières années, des civils israéliens ont mis le feu à des dizaines de maisons, de mosquées, d’entreprises, de terres agricoles et de véhicules palestiniens en Cisjordanie », a dit B’Tselem. « La très grande majorité de ces affaires ne fut jamais résolue et, dans beaucoup d’entre elles, la police israélienne ne s’est même pas donné le mal d’engager les plus élémentaires investigations. »

Impunité et laxisme sont la norme, même dans les cas les plus brutaux et les plus insignes.

Il y a juste un peu plus d’un an, un groupe de jeunes Israéliens a enlevé et brûlé à mort l’adolescent de Jérusalem Est occupée Muhammad Abu Khudair. Dans cette affaire, la police israélienne a pris tout son temps pour trouver les suspects, en dépit du fait qu’elle avait un enregistrement vidéo, avec leurs visages et la voiture en fuite, d’abord publiée exclusivement par The Electronic Intifada.

Ce n’est peut-être que grâce à l’énorme réprobation internationale qu’elle a fini par s’inquiéter de les trouver.

Leur affaire fait son petit chemin dans les tribunaux israéliens, mais il y a peu de raisons de faire confiance à un système qui traite les Israéliens qui attaquent ou tuent les Palestiniens avec une exceptionnelle mansuétude.

Ce mois-ci, deux Israéliens qui avaient brûlé une école judéo-arabe de Jérusalem ont eu une condamnation légère en dépit du fait qu’ils n’ont manifesté aucun repentir. En sortant du tribunal, ils ont déclaré que ce crime « valait la peine pour décourager « l’assimilation » entre Juifs et Arabes.

Brûlés dans un taxi

Puis il y eut l’affaire de la famille que des colons ont brûlés vifs le 16 août 2012.

Jamila Hassan, son mari Ayman et leurs enfants Iman, 4 ans, et Muhammad, 6 ans, roulaient dans un taxi au sud de Bethléem en Cisjordanie occupée, avec un autre passager et le chauffeur.

La voiture a été frappée par un cocktail Molotov. Ayman et les deux enfants furent gravement blessés. Muhammad souffraient de graves brûlures sur tout le corps.

« Nous sommes perdus, notre vie a été toute chamboulée. Le père, le fils et la fille sont chacun dans des mondes différents, notre vie est difficile et misérable », a dit Jamila à l’Agence Ma’an News deux semaines après l’attaque.

Muhammad venait juste de se réveiller en souffrant le martyr après une nouvelle opération chirurgicale. « Il hurle de douleur » a dit sa mère.

A ce moment là aussi il y eut des promesses israéliennes de « justice ». Mais qu’arriva-t-il ?

La police arrêta trois mineurs d’une colonie juive voisine et dirent au juge qu’ils avaient trouvé des empreintes digitales sur la scène liant les suspects au crime.

Selon Haaretz, le juge Yaron Mintkevich décida de garder les garçons en détention « le coeur lourd étant donné leur âge » – on adit qu’ils avaient entre 12 et 13 ans.

Mais en janvier 2013, Les procureurs israéliens abandonnèrent l’affaire en alléguant un « manque de preuves ».

S’ils avaient été des enfants palestiniens accusés de jeter des pierres sur les soldats d’occupation, ils auraient été maintenus en détention pendant des mois, soumis à des abus terribles équivalents à de la torture, et forcés à avouer.

De manière évidente, ce n’est pas ainsi qu’Israël traite ses propres colons qui sont sous juridiction israélienne, tandis que les Palestiniens, y compris les enfants, sont soumis à la parodie de justice des tribunaux militaires.

Démanteler l’apartheid israélien

Cette inégalité coloniale intégrée nous rappelle que les colons ne sont pas la cause, mais simplement une vilaine manifestation de la violence coloniale israélienne, enracinée dans le sionisme, et qui est nourrie d’en haut.

Qui peut croire qu’un ministère de la « justice » dirigé par Ayelet Shaked – qui dans son tristement célèbre appel génocidaire de l’an dernier réclamait le meurtre des mères palestiniennes qui donnent naissance à des « petits serpents » – puisse rendre justice aux Palestiniens ?

Peut-être que les colons qui ont brûlé à mort le petit Ali ont trouvé leur courage dans les mots de Shaked ou ceux de n’importe quel autre politicien israélien qui excitent régulièrement les esprits contre les Palestiniens dans les termes les plus extrêmes et les plus violents.

Le résultat final, c’est ceci : le meurtre de centaines d’enfants à Gaza l’été dernier, la mort par le feu de Muhammad Abu Khudair, l’attaque qui a tué Ali Dawabsha, tout ceci fait partie du prix que les Palestiniens doivent payer pour qu’Israël continue à exister et se déploie sur leur terre comme un Etat raciste auto-proclamé « Etat juif ».

La seule façon pour Ali Dawabsha ou n’importe quel autre Palestinien d’obtenir justice du système d’apartheid israélien, c’est qu’il soit complètement démantelé.

Traduction : J. Ch. pour l’Agence Média Palestine

Source: Electronic Intifada

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