Un classique du début du cinéma de la résistance palestinienne ressurgit

Sarah Irving – 1er mai 2015

VIDEO: https://www.youtube.com/watch?v=2WZ_7Z6vbsg

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En 2003, une jeune artiste palestinienne, Annemarie Jacir, avait passé des années à essayer de retrouver un groupe de cinéastes de la résistance qui, dans les années 1970 et au début des années 1980, avaient consacré leurs talents à la lutte de leur peuple.

Finalement, lors du festival du film « Rêves d’une nation » en Palestine, elle réussit à rassembler certains de ces réalisateurs et producteurs et leurs œuvres. Dans le cas du documentaire dramatique de 25 minutes, « Ils n’existent pas », c’était la première projection de ce film en Palestine. C’était aussi la première fois que son réalisateur, Mustafa Abu Ali, l’un des fondateurs du service cinématographique de l’OLP, voyait son œuvre en vingt ans.

Maintenant, le film est disponible gracieusement en versions YouTube ou Vimeo.

Le film d’Abu Ali de 1974 décrit les derniers jours du camp de réfugiés palestiniens de Nabatia, qui avait été créé comme refuge pour ceux qui fuyaient la Nakba de 1948, ou l’implantation de l’État d’Israël. Le camp dans le sud du Liban a été détruit par les Israéliens en 1974. La plupart des réfugiés survivants furent déplacés au camp d’Ein al-Hilwe.

Les séquences d’ouverture du documentaire montrent la vie quotidienne à Nabatia – des hommes, des femmes et des enfants effectuant leurs tâches quotidiennes et passant leur temps libre ensemble. À travers ces actes quotidiens – étendre la lessive, faire cuire le pain, surveiller les jeunes et acheter les légumes au marché –, le récit israélien de la non-existence des Palestiniens est tranquillement, mais entièrement, réfuté.

À côté de ces actes quotidiens de « l’existence, comme actes de résistance », une petite fille apporte sa petite contribution pour soutenir la résistance armée, en écrivant une lettre à un fedayin inconnu qui recevra l’un des sacs de cadeaux envoyés par les résidents du camp pour les combattants dans les collines.

Luttes de libération

Le film place explicitement la cause palestinienne au sein de la vague mondiale des luttes de libération nationale de l’époque – Vietnam, Mozambique, Afrique du Sud – et dans le cadre historique d’autres crimes impérialistes, dont les génocides des Amérindiens et les massacres nazis.

Sur cette toile de fond, nous voyons ensuite des images des raids aériens de mai-juin 1974 qui détruisirent de vastes zones du camp de Nabatia, tuant un grand nombre de civils et déplaçant, pour la deuxième fois, beaucoup des résidents du camp vers d’autres implantations de réfugiés, et notamment Ein al-Hilwe.

Ici, Abu Ali fait une utilisation particulièrement habile de ses accompagnements musicaux, avec la musique traditionnelle arabe qui crée l’ambiance pour les scènes bucoliques de la vie du camp, puis donnant la place à un concerto baroque pour violon de Bach, pénétrant et céleste dans le ton.

Aucune musique, cependant, n’accompagne les images de mort et de destruction qui succèdent aux raids israéliens ; le film reste silencieux alors qu’il nous montre des civils en état de choc, emportant des corps sans vie, des blessés, et racontant leurs souffrances.

Tout comme à ses débuts en Cisjordanie en 2003, « Ils n’existent pas » sera également projeté aux USA dans le cadre d’une tournée sur le « Cinéma de la révolution palestinienne », organisée par Emily Jacir, et qui a eu lieu en 2007.

Écrivant à l’époque, Murphy Maureen de The Electronic Intifada, notait que « le film réfute hardiment tant l’affirmation de Meir (l’ancien Premier ministre Golda Meir) selon laquelle, ici, il n’y a aucun peuple palestinien, que les vantardises d’un Moshe Dayan disant qu’il n’existe plus aucun endroit à s’appeler Palestine ».

Et Annemarie Jacir a réfléchi dans sa recherche, qui a abouti à la projection en 2003 en Palestine de « Ils n’existent pas », que :

Ces cinéastes comprenaient les fondateurs Mustafa Abu Ali, Sulafa Jadallah, et Hani Jawhriya. Les autres étaient Khadija Abu Ali, Ismael Shammout, Rafiq Hijjar, Nabiha Lufti, Fuad Zentut, Jean Chamoun et Samir Nimr. La plupart étaient des réfugiés, bannis de leurs foyers en Palestine. Et puis, il y avait d’autres Arabes qui se montraient solidaires d’eux, consacrant leur œuvre à une juste cause. Leurs films étaient projetés dans tout le monde arabe et internationalement, mais jamais en Palestine. Aucun des cinéastes n’était autorisé à entrer en Palestine, ni dans ce qui est connu comme étant Israël, à plus forte raison leurs pellicules.

Aujourd’hui, il est à espérer que, avec la réapparition de ces films et l’accès massif à Internet, de nouveaux publics vont pouvoir regarder ces classiques de l’art de la résistance palestinienne et étendre leur compréhension de la résistance à multiples facettes des années 1970.

Traduction : JPP pour l’Agence Média Palestine

Source: Electronic Intifada

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