Handala et la campagne BDS : un autre angle de vue sur l’identité palestinienne

Handala et la campagne BDS :

un autre angle de vue sur l’identité palestinienne

 

 

Par Sivan Halévy, co-auteur de « Le livre de Handala », édition Scribest

Handala Handala par BDS

Nous serions en Palestine, ou quasiment partout ailleurs au Proche-orient, « Handala » n’aurait pas besoin d’être introduit. Non pas qu’il suffise que nous fassions partis d’une aire politico-culturelle pour avoir le plein entendement de quelque chose qui s’y réfère, mais il s’agit ici de parler d’un personnage, et de ses valeurs, qui était jusqu’à quelques années presque totalement inconnu en France, et même peu connu au sein des réseaux français de solidarité avec le peuple palestinien, alors qu’il est d’une très grande popularité là-bas…

Handala vient de l’amertume de la coloquinte, en arabe. Il s’agit d’un personnage créé par le dessinateur de presse palestinien Naji al-Ali. Il est apparu officiellement le 13 juillet 1969 dans le journal koweïtien as-Siyasa (la politique).

                                                                    

Naissance officielle de Handala

Naji al-Ali a été assassiné à l’été 1987 à Londres pour le discours et l’impact de ses dessins. Mais son personnage Handala n’en a pas cessé de vivre pour autant.

Handala est à la fois la promesse de ne pas trahir la cause du peuple arabe, et palestinien en particulier, trahi de toutes parts ; l’expression de l’attachement à la terre natale de Palestine (Naji al-Ali a, comme quelques 800 000 autres Palestiniens.nes, subit la Nakba, la Catastrophe, période contemporaine de la création de l’Etat d’Israël qui lui a permis de détruire environs 500 villages palestiniens : expulsé de son village al-Shajara en Galilée, il s’est retrouvé réfugié dans le camp de Ein el-Helwe dans le sud du Liban, près de Saïda) ; la dénonciation de tous les complots (israéliens, arabes, étatsuniens) ourdis contre le peuple arabe ; mais aussi l’espoir dans le panarabisme issu de Nasser, la reconnaissance du rôle des femmes palestiniennes dans la persistance de l’esprit de résistance, l’attachement au Liban et à son peuple… Handala est beaucoup de ces choses qui font jusqu’à aujourd’hui l’oppression du peuple arabe en général et du peuple palestinien en particulier ainsi que leurs cris de résistance.

Aujourd’hui, Handala est devenu un symbole du « Droit au retour » des Palestiniens.nes sur leur terre. Et il commence à être connu dans la sphère politico-culturelle dite « occidentale » entre autres grâce à l’édition de livres des dessins de Naji al-Ali.

                                                                                     

1983 – Livre publié par as-Safir – Liban

Mon travail autour de Handala, en lien avec la famille de Naji al-Ali, m’a amené à m’engager depuis 2012 dans une démarche de film documentaire visant à aborder l’actualité de ce personnage en Palestine, 25 ans après l’assassinat de son créateur. Sur ce chemin j’ai interviewé en juin 2013 à Ramallah Omar Barghouti, un des porte-parole de la campagne BDS (Boycott-Désinvestissements-Sanctions contre l’Etat d’Israël jusqu’à ce qu’il respecte le Droit international et les droits des Palestiniens) me demandant à la fois quel est le sens de Handala pour cette campagne dont il est l’effigie, mais aussi dans quelle mesure le rayonnement international de cette campagne n’était pas une des causes premières de l’actuel rayonnement international de Handala.

L’article ici présenté sont des extraits, traduits de l’anglais par moi-même, d’un interview qui a duré une heure.

Présentation de la campagne BDS

Omar Barghouti : « BDS est inspiré par un long héritage de lutte en Palestine, de résistance populaire, qui inclut le boycott dès les années 20, le colonialisme des colons juifs sionistes. Les Palestiniens ont toujours fait la différence entre les Juifs immigrés venant en Palestine pour trouver refuge à cause des persécutions en Europe et ceux qui sont venus dans le cadre d’un agenda colonial. En 2001 il y a eu la conférence contre le racisme en Afrique du Sud. Les ONG y ont lancé une campagne pour boycotter Israël parce qu’elles y voyaient un nouvel Etat d’apartheid. Cela nous a amené à lancer la PACBI (Campagne palestinienne pour le boycott académique et culturel) en 2004 à l’encontre des institutions académiques et culturelles israéliennes au regard de leur profonde complicité avec le système israélien d’occupation, de colonisation et d’apartheid. Cela a joué un rôle clef dans la création du mouvement BDS avec d’autres réseaux centraux de la société civile. BDS inclut le boycott académique et culturel mais aussi économique, militaire, financier, sportifs… et a été adopté par tous les groupes majeurs de la société civile palestinienne. L’appel lancé le 9 juillet 2005 revendique la fin de l’occupation, la fin de l’apartheid, ou le système israélien d’inégalités et de discriminations raciales, et le Droit au retour pour les réfugiés. Nous soulignons toujours que ce dernier, le rêve de Naji al-Ali, de Handala, est le plus important non pas idéologiquement mais pratiquement parce que 69% des Palestiniens sont des réfugiés ou des personnes déplacées à l’intérieur ou à l’extérieur de la Palestine historique. Il s’agit là du principe le plus important de la lutte palestinienne pour la liberté et les droits, le plus important des droits du peuple palestinien. Ainsi BDS a appelé le monde à boycotter Israël, à y désinvestir et à désinvestir de ses compagnies et institutions qui soutiennent le régime israélien d’occupation, d’apartheid et de colonisation, et éventuellement à pousser à des sanctions par les Etats, les Nations unies, l’Union européenne comme cela a été fait contre l’apartheid en Afrique du Sud. Nous sommes très inspiré par le mouvement anti-apartheid d’Afrique du Sud et la solidarité avec. Mais BDS n’est pas une copie de Gandhi, Mandela ou Martin Luther King. Nous en sommes inspirés bien sur mais il s’agit d’un mouvement palestinien enraciné dans des décennies de résistance populaire et civile à l’épuration ethnique, au colonialisme des colons, à l’occupation… »

Sivan Halévy : « Quel est le sens d’utiliser Handala comme effigie de la campagne BDS ? »

O. B. : « Handala est un des symboles palestiniens le plus connu. Il a été utilisé par beaucoup d’organisations palestiniennes, de réseaux, de campagnes, à l’intérieur de la Palestine ou au sein des Palestiniens exilés. Naji al-Ali est une figure très respectée de la résistance culturelle palestinienne. Certaines personnes voient Handala comme passif, attendant de revenir, tournant son dos à la vie et ne montrant pas son visage jusqu’à ce qu’il revienne en Palestine, à al-Shajara, où Naji al-Ali est né. Nous voyons Handala comme un résistant car après tout il n’est pas une personne indépendante mais la création de Naji al-Ali, une image de lui, une sorte d’autoportrait, d’autobiographie. Ainsi, Naji al-Ali nous offre ses pensées, ses idées, sa personnalité à travers Handala. Ce que Handala fait, provoque et défi c’est toujours la résistance, la dignité, les principes, les droits humains, l’insistance pour notre liberté, notre libération. C’est dans cette perspective que nous avons choisi Handala comme symbole de résistance et BDS est bien sur une forme de résistance. BDS a été lancé par la société palestinienne, est menée par les Palestiniens et sa référence est en Palestine occupée, mais c’est un mouvement global, nous avions donc besoin d’un logo très palestinien. Nous y avons ajouté la balance de la Justice qui est un symbole universel, afin de souligner que Handala et le mouvement BDS résistent pour réaliser la Justice et rien que le Justice. Parler de paix sans Justice ne nous intéresse pas car nous ne voulons pas seulement la Paix mais la Paix avec la Justice. La Paix sans la Justice équivaut à institutionnaliser l’Injustice. Nous ne sommes pas intéressés par cela en tant que peuple opprimé. »

                                                                                          

21 février 1982 – as-Safir – Liban

« Intifada »

Sivan Halévy : « Pourquoi ne pas avoir fait usage de l’image du cactus, sabbar1, par exemple ? »

O. B. : « C’est moins une forme de résistance active que passive. Le cactus n’agit pas. Il reste juste là : vous le coupez, il repousse mais il attend que quelque chose arrive, il n’agit pas. Nous voyons Handala différemment : il a un cactus mais il est au-delà du cactus, il est humain, il agit sans nous montrer comment, le plus souvent nous ne voyons pas ce qu’il fait mais il est clairement le centre de l’univers des dessins de Naji al-Ali. Il est le défi de toutes ses actions, de toutes ses pensées. »

Sivan Halévy : « Quelle est la forme de lutte de la campagne BDS ? »

O. B. : « Le boycott est une forme non-violente de lutte et une forme de résistance basée sur les droits humains universels. Toute personne en accord avec BDS doit accepter les droits humains universels comme la référence ultime. Beaucoup de gens n’accepte pas le droit international et nous savons tous les défauts du droit international. Nous savons qui a écrit le droit international, les Etats victorieux de la deuxième Guerre mondiale, les puissances impériales, pour leur propre intérêt. Cela n’a rien à voir avec les peuples, avec le « tiers » monde, avec la protection des colonisés, c’est pour le monde des entreprises et leurs empires, pour se diviser le monde en sphère d’influence. Pour autant, quand vous faites partis d’une communauté oppressée vous avez le droit international ou la loi de la jungle. Alors nous avons choisi le droit international malgré ses problèmes et nous essayons de l’interpréter d’une manière qui soutienne nos droits. Nous n’avons pas le sentiment qu’il y a là un problème ou une contradiction. »

S.H. : « Est-ce que le contexte de l’échec des accords d’Oslo, du développement de l’Autorité Palestinienne, du développement du « state building »2 et toutes les conséquences que cela a en matière d’orientation économique pour la société palestinienne, peut générer tellement de colère que le mouvement BDS peut à un moment, non pas en son sein mais pour les gens, renforcer cette colère au point de participer à leur explosion ? »

O.B. : « Oui mais pas dans le mouvement BDS car ça n’y a pas sa place. BDS n’est la seule forme de lutte, ce n’est qu’une des formes, non-violente par définition. C’est la seule manière dont nous agissons. Ainsi, si par exemple je travaille dans un groupe féministe, je n’apporte pas ces enjeux au sein de BDS. Je fais ce travail au sein des groupes féministes et le travail BDS au sein de BDS. Chaque Palestinien a plusieurs « chapeaux », plusieurs identités et nous luttons sur la base de ces identités multiples dans les sphères appropriées. Ainsi, si j’ai beaucoup de colère et que je veuille l’exprimer, pourquoi à travers BDS ? Je veux dire que BDS n’offre pas de plate-forme pour des actions violentes. Il est assez ironique que les seuls fois qu’en tant qu’activiste de BDS j’ai fait face à la violence ça a été à Paris et Toronto où j’ai été menacé et même violemment attaqué par des sionistes terroristes ou extrémistes. »

Les valeurs de Naji al-Ali et Handala dans le contexte palestinien actuel

S.H. : « A la période de Naji al-Ali, l’Autorité Palestinienne comme les accords d’Oslo n’existaient pas et essentiellement Naji al-Ali vient du mouvement nationaliste arabe. Aujourd’hui nous avons un contexte à l’intérieur de la Palestine totalement différent principalement du aux accords d’Oslo et à l’Autorité Palestinienne. Un des aspects importants à propos de l’Autorité Palestinienne est le « state building » et le développement économique qui y est lié et génère des choses comme Rawabe3 à Ramallah. Quel est le sens de ce contexte au regard des valeurs de Naji al-Ali et Handala et comment ce contexte positionne le peuple palestinien différemment qu’à l’époque de Naji al-Ali ? »

O.B. : « Je donnerais ici mon opinion personnelle et pas en tant qu’activiste de BDS car en son sein nous nous en tenons à notre mandat -mettre fin à l’occupation, à l’apartheid et réaliser le droit au retour- et nous n’avons aucun autre agenda politique en dehors de cela. Chacun de nous a son opinion sur des sujets en dehors de ce mandat, ainsi en tant que chercheur indépendant, en tant qu’analyste, je vois l’Autorité Palestinienne, comme je l’ai déjà écrit dans plusieurs langues, comme un sous-traitant de l’occupation, clairement et simplement. Je veux dire que l’AP a pour mandat de porter des choses que l’autorité occupante ne veut pas porter : collecter les impôts, nettoyer les rues, faire fonctionner le système éducatif, protéger les colonies de toutes les résistances palestiniennes et prévenir l’accès de la résistance palestinienne aux colonies. C’est la raison pour laquelle l’AP a été créée dans le cadre des accords d’Oslo. Cela ne veut pas dire que chaque personne en son sein est mauvais ou pas nationaliste, nombreuses sont celles qui sont biens, mais elles travaillent dans une structure établie pour servir et maintenir l’occupation israélienne. La coopération sécuritaire entre les forces de sécurité palestiniennes et les forces de sécurité et l’armée israéliennes est l’exemple le plus clair d’une relation de sous-traitance. Tous nos droits sont pris en otage par Israël : commerce, impôt, importation, exportation, monnaie, liberté de circulation. Ainsi, il n’y a pas de réelle autorité dans l’AP, vraiment, je veux dire que c’est le mauvais terme ; c’est quelque chose de palestinien mais pas une autorité car il lui manque toutes les formes de l’autorité sur les vrais enjeux. Elle a l’autorité pour réprimer les Palestiniens mais pas pour représenter et défendre les droits fondamentaux du peuple palestinien, inclus les réfugiés. Si Naji al-Ali était aujourd’hui en vie il serait fortement en colère, déprimé. Je me dis que peut être c’est mieux que Handala tourne le dos à cela car c’est une réalité dégoûtante. Mais malgré cela la résistance tant au niveau personnel que collectif se poursuit. »

« Yasir » : Yasser Arafatt – « Yes sir » : oui monsieur

S.H. : « A l’époque de Naji al-Ali, la lutte des classes était une dimension fondamentale et aujourd’hui la pauvreté est très importante en Palestine. J’ai entendu parler du fort taux d’endettement, nous avons vu les manifestations sur les questions économiques et sociales et dans le même temps on nous a dit : « quand nous combattons la pauvreté nous oublions de combattre l’occupation ». C’est un des points d’interrogation au sujet d’une troisième intifada : contre qui ? »

O.B. : « Nous ne traitons pas de cela au sein du mouvement BDS, nous en restons à notre mandat afin de ne pas sombrer dans les désaccords et autres divisions. Pour autant, je pense, personnellement, que la pauvreté dans les Territoires occupés est une fonction de l’occupation et des politiques néo-libérales imposées par les Etats-Unis, la Banque mondiale, l’Union européenne. Nous ne pouvons l’ignorer. Pousser les Palestiniens à l’endettement n’est pas une coïncidence, quelque chose qui arrive naturellement dans le développement économique ou une envie subite des Palestiniens de vouloir acheter plus. C’est pensé stratégiquement. Si tu es endetté tu ne peux te permettre d’aller en prison car alors tu seras dévasté : ne pouvant rembourser ils prendront ta maison, ta vie.10, 20 ans auparavant les gens avaient presque rien à perdre, alors ils voulaient lutter. Cette orientation de l’énergie n’a rien de nouveau, c’est la politique néo-libérale aux Etats-Unis, en Europe, au Brésil, en Turquie, partout. La différence que nous avons c’est l’occupation. Nous ne faisons pas face à une dictature néo-libérale comme en Egypte, au Yémen ou en Tunisie, nous faisons face à une occupation, un système d’apartheid qui a un composant palestinien, ce qui est très différent. »

30 janvier 1984 – al-Qabas – Koweït 2 novembre 1981 – as-Safir

S.H. : « Cela veut-il dire que le prochain soulèvement pourrait être contre le système libéral, contre les banques et pourrait ouvrir la lutte palestinienne à une lutte plus globale et aussi se relier aux valeurs internationales de Handala, de Naji al-Ali ? »

O.B. : « Personnellement, je pense que les choses vont ensemble. S’il y a une troisième intifada ce sera pour les mêmes raisons : nos droits et contre quiconque s’y met en travers. Israël et ses complices occidentaux mais aussi son sous-traitant local qui doit aussi être graduellement et de manière responsable démantelé dans la lutte. Mais je pense que la grande majorité des Palestiniens dans les Territoires occupés continue de voir l’occupation comme notre plus important ennemi et je doute qu’un mouvement appelant au soulèvement contre l’AP reussirait. Nous gardons notre regard porté sur l’ennemi, l’occupation et le régime d’apartheid, tout le reste est un détail qui fait parti du tableau d’ensemble. Ainsi, toute lutte pour nos droits, si elle est bien conçue, doit voir la connection entre les choses.

S.H.4 : « Si BDS est une mise en œuvre de Handala aujourd’hui, quelles autres mises existe-t-il ? Et qu’en est-il des Palestiniens.nes de 48 qui peuvent être vus comme Naji al-Ali au Koweït : devant faire face au risque de trahir la cause car portés par le rythme israélien comme Naji al-Ali a vu le risque de devenir « tanabel », porté par la bonne vie koweitienne, raison pour laquelle il a créé Handala, afin de ne pas trahir ? »

O.B. : « Je pense personnellement que quand Naji al-Ali a été tué, la lutte pour les droits des réfugiés palestiniens était délaissée par le monde, par beaucoup de Palestiniens. Aujourd’hui, bien que ce qui est appelé le « leadership » palestinien ignore le droit au retour, sa conscience est devenue prévalente parmi les Palestiniens et spécialement ceux de 48. A l’époque de Naji al-Ali le droit au retour n’était pas dans l’agenda de la plupart des Palestiniens de 48. A part quelques branches des partis de la gauche radicale, le courant principal des Palestiniens de 48 ne portait pas le drapeau palestinien. C’était illégal. Aujourd’hui c’est le seul drapeau porté en 48. Durant les massacres à Gaza en 2008/2009 la plus grande manifestation n’était pas en Cisjordanie ou dans la diaspora (shatat) mais en 48. Ainsi, nous sommes divisés à cause de l’occupation et de la colonisation mais nous sommes plus que jamais unis sur nos droits élémentaires. Le retour s’entend dans le lieu qui a été épuré ethniquement, pas en Cisjordanie ou à Gaza. Je pense que les Palestiniens de 48 ont un énorme potentiel qui n’a pas encore été réalisé, surtout parce que l’OLP et le monde arabe les a ignoré depuis des décennies. Leur potentiel est énorme car ils vivent au sein d’Israël, du régime d’apartheid. Nous devons renforcer les liens entre 67, 48 et la diaspora. Mais nous luttons dans différents contextes. Les lignes directrices de BDS en 48 prennent en considération la différence de réalité. En 48 tu ne peux boycotter les hôpitaux, les différents ministères, les fonds culturels, tu y as droit en tant que personne imposable tout en luttant pour lettre fin au régime d’apartheid. C’est la responsabilité de tous mais les Palestiniens de 48 sont les plus à même d’exposer la dimension mythologique de la démocratie israélienne. Si l’approche de ce qu’il se passe dans le Naqab consiste à dire qu’il faut que les bédouins palestiniens doivent convaincre l’Etat de leur donner plus de droits, se serait se tromper complètement. Ce n’est pas un Etat qui a quelques problèmes mais un Etat qui continue la Nakba, l’épuration ethnique dans le Naqab. »

S.H. : « Pensez-vous que la situation est telle que cela aurait pu amener Naji al-Ali à dessiner une nouvelle étape de Handala ? En 1969 Handala a été créé avec son visage face à nous, puis Naji al-Ali dit qu’il a retourné Handala relativement à la guerre d’octobre 73 et à la politique de Kissinger. Est-ce qu’aujourd’hui il aurait pu dessiner autrement Handala ? »

O.B. : « Qui peut deviner ce qu’un génie comme Naji al-Ali aurait fait ? Mais il aurait été très actif, productif, s’opposant à Israël, l’ennemi principal, son occupation, son apartheid mais aussi ses sous-traitants. Il n’aurait pas pris cela à la légère. Il se serait définitivement opposé à toutes formes de normalisation avec l’occupation. Tel est Naji al-Ali. Les principes viennent en premier pour lui. Il n’a jamais trahi ses principes, que ce soit pour de l’argent, pour le prestige, pour un travail, pour rien. Ainsi, je pense qu’il aurait été en première ligne, avec le peuple, combattant contre l’oppression. »

Encart

27 avril 1966 – al-Talya (l’avant garde) – Koweït

« Boycott »

« 1966, ce dessin, avant Handala ! Je ne savais pas qu’il existait. C’est un très bon dessins et très tôt. Cela montre que Naji al-Ali avait compris comme d’habitude de nombreuses choses. La complicité des entreprises dans la négation de nos droits. Coca-Cola a été une des premières à ouvrir une usine en Israël, à participer à notre oppression, à couvrir le régime israélien d’oppression. Naji a là une vision « d’avant -garde ». Et appeler au boycott montre que Naji al-Ali qui supportait oralement la résistance armée n’était pas enfermé dans le dogme selon lequel se serait la seule résistance. Lui il a pratiqué la résistance culturelle. Il a toujours vu que les peuples, les masses résistent de bien des manières. Et le boycott est une d’elle. »

 

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